La nature des effets astrologiques est avant tout conjecturale, stochastique et chaotique. Il n’existe par conséquent pas de déterminisme astrologique mécanique dont une étude statistique pourrait montrer, et non démontrer, la probabilité ou l’improbabilité. Ce fait n’a pas empêché partisans et adversaires de l’astrologie de s’y livrer pour le meilleur (rarement) et le pire (presque toujours). Pourtant, des études statistiques sérieusement conduites pourraient mettre en relief et détecter quelques-uns des effets astrologiques les plus saillants et donc les plus visibles. Mais celles-ci n’ont encore jamais été réalisées, bien que tous les éléments soient réunis pour qu’elles puissent être faites. Pour des chercheurs audacieux, un vaste territoire inconnu reste donc à explorer, sachant qu’il se limiterait à la partie émergée de l’iceberg astrologique, dont environ 90 %, en filant cette glaciale métaphore, resteraient donc hors de portée de toute statistique…
“Si la base est solide, la maison est solide” (Yi King).
“Quand la fraude a construit une maison, elle la détruit” (proverbe malinké).
“Le sage n’a ni maison, ni parenté, ni patrie” (Philon d’Alexandrie, philosophe).
Depuis l’avènement de l’informatique qui a permis la création de logiciels de calculs astronomiques à usage des astrologues, il va aussi de soi qu’on peut opter en un clic pour le système de domification qu’on désire. On peut ainsi instantanément choisir entre le système de calcul des Maisons de Placide, de Porphyre, de Dodécatropos, de Régiomontanus, de Firmicus Maternus, de Rhétorius, d’Alcabitius, d’Albategnius, d’Abenragel, de Campanus ou de Koch et d’autres encore. On n’a pas à se soucier de savoir si le système sur lequel on a cliqué se fonde sur des bases écliptiques, horizontales, équatoriales, ou méridiennes, ou encore sur un référentiel spatial ou temporel, quand une carte du ciel apparaît immédiatement à l’écran suite à ce choix. On ne se demande pas si certains sont plus pertinents que d’autres pour représenter le réel des mouvements zodiaco-planétaires en deux dimensions sur un écran d’ordinateur, de tablette ou de smartphone. On choisit et on consomme du degré Ascendant et de la pointe de Maison sans toujours bien savoir de quoi il s’agit, sur quelles réalités astronomiques tout cela est fondé.
C’est très rapide, très pratique et même très utile. Pourtant rien de tout cela ne va de soi. Les différents systèmes proposés ont été imaginés au cours des siècles précédents par différents astrologues aux compétences astronomiques très variées. Certains n’en avaient que de très rudimentaires, celles des plus savants étaient très élaborées, mais aucun de ces systèmes n’a été inventé ou découvert en un clic. Tous ont été le fruit de questionnements et de recherches à tâtons. Certains sont parfaitement ineptes et inaptes à décrire correctement le réel astronomique ; d’autres s’en approchent au plus près, comme celui improprement attribué à Placidus alors qu’il a été élaboré par Ptolémée. Le système ptoléméo-placidien est heureusement le plus couramment utilisé puisqu’il est celui qui est choisi par défaut par la plupart des logiciels astrologiques. Et la plupart des mêmes logiciels ne donne aucune information sur la pertinence astronomique des divers systèmes, alors que celle-ci devrait être un élément décisif dans le choix d’un système plutôt que d’un autre. Du coup, tous paraissent égaux en qualité dans le menu déroulant où ils figurent. Ce qui est parfaitement faux.
Le choix d’un système plutôt que d’un autre ayant une influence directe sur l’interprétation qui sera faite du Thème ainsi obtenu, il en résulte que, quelque soit la pertinence et la qualité des modules d’interprétation proposés par certains logiciels, cette dernière pourra être partiellement ou complètement fausse si on a cliqué sur un mauvais système. En effet, la détermination des dominantes zodiaco-planétaires d’un Thème est en partie dépendante du système de domification choisi. De plus, même si ce système est le plus pertinent - en l’occurrence celui de Ptolémée-Placidus - encore-faut-il que le logiciel ne se contente pas de prendre en compte les seules longitudes écliptiques pour calculer les positions planétaires dans les Maisons. Il faut aussi impérativement qu’il intègre les latitudes écliptiques des planètes pour que ces positions soient aussi conformes que possible au réel astronomique. Or les logiciels proposant ce type de calcul sont très peu nombreux, et l’option de calcul des latitudes écliptiques n’est jamais installée par défaut. C’est à l’utilisateur, le plus souvent ignorant en matière astronomique, qu’il revient de l’inclure dans les calculs en cliquant sur une option. Autant dire que cette option n’est presque jamais sélectionnée, alors même qu’il s’agit d’un paramètre essentiel pour connaître les positions planétaires réelles dans les Maisons.
On voit donc que les délimitations des Maisons, indépendamment des significations réelles ou imaginaires qui sont attribuées à ces secteurs de la sphère locale, jouent un rôle important dans l’interprétation d’un ciel de naissance. Et c’est d’ailleurs en étudiant les fréquences de répartition des Planètes dans ces secteurs, sans se soucier des significations de ceux-ci répétons-le, que l’astro-statistique a permis de mettre en évidence des secteurs-clés déterminant des dominantes planétaires.
Le problème de l’historique des Maisons astrologiques mérite donc d’être mieux connu et approfondi. On n’abordera pas ici celui de la pertinence des différents systèmes (ce n’est pas le sujet), mais celui de la conception de ces secteurs, qui diffère très sensiblement selon les époques et l’hégémonie exercée par tel ou tel astrologue savant.
Dans ce qu’il est convenu d’appeler la “tradition” astrologique, et qui se réfère essentiellement à la conversion et à l’adaptation de l’astrologie suméro-chaldéenne aux conceptions hellénistiques à partir du IVe siècle avant J.C., les 12 secteurs de la sphère locale ou Maisons sont numérotés dans le sens sénestrogyre (sens inverse des aiguilles d’une montre). Le sens sénestrogyre est celui du mouvement annuel des planètes autour du Soleil. Cette numérotation est contre-intuitive au plan de la représentation, en ce qu’elle s’oppose au sens dextrotrogyre (sens des aiguilles d’une montre) qui est celui de la rotation journalière des astres sur l’écliptique autour de l’horizon.
On peut même estimer à juste titre que cette numérotation sénestrogyre “traditionnelle” est une absurdité. Il serait en effet beaucoup plus rationnel et conforme au réel apparent de la sphère locale de procéder à une numérotation dextrotrogyre des Maisons. On affecterait ainsi les Maisons I, II & III au quadrant oriental croissant (1er semi-arc diurne du point ascendant au méridien supérieur), les Maisons IV, V & VI au quadrant occidental décroissant (2e semi-arc diurne du méridien supérieur au point descendant), les Maisons VII, VIII & IX au quadrant occidental croissant (1er semi-arc nocturne du point descendant au méridien inférieur) et enfin les Maisons X, XI & XII au quadrant oriental décroissant (2e semi-arc nocturne du méridien inférieur au point ascendant). Il faut savoir qu’avant ce tardif ajout grec sénestrogyre, c’était ainsi que les astrologues comptaient les secteurs de la sphère locale (quadrants ou Maisons).
La ressemblance de ces antiques Maisons angulaires dextrogyres avec les “secteurs-clés” des statistiques Gauquelin réalisées avec des naissances d’avant 1960 est absolument frappante :
Certains (Léon Lasson ou Françoise Gauquelin notamment) arguent d’une lointaine tradition suméro-babylonienne pour légitimer historiquement cette numérotation dextrogyre. Ils se trompent : l’astrologie chaldéenne ou sumérienne n’avait pas de système de division de la sphère locale comparable au système des Maisons. En tout cas, les cartes du ciel de cette époque n’en font aucune mention. En effet, les astrologues babyloniens avaient une vision dynamique et temporelle des mouvements planétaires circum-horizontaux. Leur astronomie planétaire de position se référait uniquement aux temps d’ascension des Planètes sur l’écliptique à partir de leur lever, lesquels permettaient de déduire quand elles culmineraient au méridien supérieur. Et c’est à partir de ces calculs chaldéens de temps d’ascension que furent plus tard imaginés par les Grecs divers systèmes de domification, qui eux-mêmes accouchèrent des 12 Maisons auxquelles furent ultérieurement attribuées des Significations, toutes choses qui étaient étrangères à la conception de la sphère locale des babyloniens.
On peut s’interroger sur la raison qui a incité les Grecs à adopter le système de numérotation sénestrogyre à une époque indéterminée. Il n’est en effet d’aucune utilité pratique au plan des calculs astronomiques. Il a eu pour seul résultat de semer la confusion entre les rotations planétaires sénestrogyres annuelles dans la sphère céleste (dont le centre est celui de la Terre) et rotations planétaires dextrogyres journalières dans la sphère locale (dont le centre est l’œil de l’observateur). Cela reste un mystère, puisqu’aucun document d’époque ne permet de savoir quel cheminement mental a abouti à cet absurde résultat. On peut néanmoins en avoir un aperçu confus à la lecture du chapitre IX de L’Astrologie grecque de Auguste Bouché-Leclerc, historien spécialiste de l’antiquité gréco-romaine et anti-astrologue déclaré.
La détermination des zones de valorisations planétaires en fonction des axes horizontal et méridien dans la sphère locale est un problème central qui a toujours préoccupé les astronomes-astrologues savants de l’antiquité. Le plan méridien ne posait aucun problème, ce qui n’était pas le cas du plan horizontal. En effet, la culmination exacte d’une Planète au méridien supérieur (MC, Milieu-du-Ciel) est un phénomène que l’on peut définir sans ambiguïté. Elle est alors au plus haut de sa course diurne quotidienne, alors qu’une Planète au méridien inférieur (FC, Fond-du-Ciel) est au plus bas sous l’horizon dans sa course nocturne. Cette non-ambiguïté du caractère diurne ou nocturne d’une Planète méridienne est la raison pour laquelle Ptolémée estime, dans sa Tétrabible, que les Planètes les plus influentes se situent à proximité du méridien supérieur, étant donné que les effets diurnes (au-dessus de l’horizon) l’emportent sur les effets nocturnes (sous l’horizon).
Le seul problème qui se posait - et se pose toujours - d’un point de vue astrologique était de définir l’étendue ou la durée des deux zones situées de part et d’autre du méridien, zones à l’intérieur desquelles les Planètes sont considérées comme particulièrement influentes, sachant que cette influence s’amoindrit ou disparaît lorsqu’elles se situent avant ou après ces deux zones.
La détermination de l’étendue et de la durée des zones horizontales entourant le levant (Ascendant) et le couchant (Descendant) pose en effet un problème plus complexe. Elle a un rapport premier et direct avec la détermination du point horoscopique. D’un point de vue purement astronomique, celui-ci désigne l’endroit précis de l’intersection entre le plan de l’écliptique et celui de l’horizon Est, dénommé point levant ou point Ascendant. Il avait en effet été observé que les Planètes à leur lever avaient un effet important au moment d’une naissance.
La question fut alors - et reste encore - de déterminer aussi précisément que possible l’étendue et la durée de cette “zone ascendante” et de son opposé à l’horizon Ouest, la “zone descendante”. En effet, ces deux zones sont constituées d’une partie diurne correspondant aux Maisons XII et VII (zones ascendante et descendante au-dessus de l’horizon), et d’une partie nocturne correspondant aux Maisons I et VI (zones ascendante et descendante sous l’horizon). Une précision s’impose : ici les Maisons sont uniquement considérées comme le résultat astronomique de la division de la sphère locale en 12 secteurs basés sur la tripartition des arcs diurnes et nocturnes. Les significations astrologiques accordées à ces secteurs n’ont aucune importance dans la démonstration qui suit.
Rappelons pout commencer que le mot “horoscope” signifie en grec “qui regarde l’heure”. Le point horoscopique définit le degré zodiacal, calculé en longitude écliptique, qui se lève à l’horizon est pour une heure donnée. Ce n’est que par un abus de langage que le mot “horoscope” est devenu un synonyme de “Thème natal”.
Intéressons-nous de plus près au point horoscopique, qui peut être défini comme le centre relatif de la “zone ascendante” à cheval sur les Maisons I & XII, et voyons comment les astrologues avant Ptolémée ont procédé pour tenter d’évaluer l’effet particulier se produisant selon eux lorsqu’une Planète se trouve à proximité. Les plus anciens textes chaldéens font avant tout état du critère de sa visibilité. La Planète ascendante se situe donc alors évidemment au-dessus de l’horizon, c’est-à-dire en Maison XII, et si elle est sur le point de se lever, donc encore invisible sous l’horizon, elle se situe en Maison I.
Les prédécesseurs de Ptolémée se demandèrent alors quand la Planète ascendante était la plus puissante. Était-ce au moment exact de son passage à l’horizon, donc sur le point horoscopique ou début de la Maison I, ou bien après, lorsqu’elle a franchi la frontière séparant le nocturne du diurne, qu’elle a alors changé d’état et est nettement visible en Maison XII ? Fallait-il aussi prendre en compte la durée pendant laquelle elle se trouvait encore sous l’horizon, donc en Maison I, sachant qu’alors elle était progressivement en train de changer d’état en finissant son parcours nocturne et se préparant à se hisser au-dessus de l’horizon et débuter son parcours diurne ?
Ces questionnements furent à l’origine de débats sur ce que les anciens astrologues appelaient le “centre” de la zone ascendante. Le “centre” se définissait comme la position à l’intérieur de cette zone où la planète avait le maximum de puissance. Il faisait l’objet de calculs divers et pour la plupart abscons dont il est inutile de faire état ici. Dans la controverse sur les “centres”, deux camps s’affrontaient. Le premier, très minoritaire, était celui des maniaques de la précision astronomique absolutiste, pour lesquels le “centre” ne pouvait être que le point horoscopique. Le second - celui des observateurs du réel astrologique - rassemblait ceux qui estimaient que le “centre” se situait quelque part à l’intérieur de la Maison XII.
La position du premier camp ne prêtant pas à discussion, c’est à ce second camp que nous allons nous intéresser. Ses partisans n’étaient pas d’accord entre eux sur trois points. Le premier point était celui de la base sur laquelle le calcul du “centre” devait s’opérer. Certains plaidaient pour un “centre” spatial, c’est-à-dire situé à un certain nombre de degrés au-dessus du point horoscopique, et d’autres pour un “centre” temporel, calculé en fonction de la durée de la progression d’une Planète au-dessus de l’horizon donc en Maison XII. D’un point de vue purement astronomique, c’étaient ces derniers qui avaient raison. Le deuxième point était celui de la position de ce “centre” à l’intérieur de la Maison XII, c’est-à-dire de sa plus ou moins grande proximité avec le point horoscopique. Enfin, le troisième point était celui du caractère absolu ou relatif de ce “centre” : s’il était absolu, la Planète devait se situer exactement sur ce “centre” ; s’il était relatif, ce “centre” n’était que le centre d’une zone à l’intérieur de laquelle la Planète pouvait être considérée comme appartenant à ce “centre”. Et la plupart des partisans du “centre relatif” s’accordaient sur le fait que l’étendue de celui-ci s’étendait jusqu’au point horoscopique, donc dans la partie de la Maison XII la plus proche de l’horizon.
Le problème du “centre” affectait aussi la conception que les anciens astrologues avaient des Maisons et de leurs délimitations, quel que fut le système de domification qu’ils utilisaient. En effet, pour la plupart d’entre eux, le “centre” et sa périphérie se confondait avec le “lieu” où il se trouvait. La notion de “lieu” était sensiblement différente de celle de Maison, en ce qu’elle désignait une section d’espace ou de temps qui pouvait, soit appartenir directement à une Maison voire même être confondue avec elle, soit être rattachée à celle-ci tout en se situant à proximité donc à l’extérieur des limites de celle-ci. L’interaction entre “lieux” et Maisons a ainsi amené un très grand nombre d’astrologues à modifier et déplacer les limites des Maisons pour y intégrer les “lieux” adjacents.
À une époque indéterminée à la fin du dernier millénaire avant J.C., les anciens décidèrent de classer les Maisons dans le sens sénestrogyre. C’est ainsi que les 12 Maisons furent divisées en trois groupes : les Maisons angulaires, succédantes et cadentes.
▶ Maisons angulaires (I, X, VII & IV) adjacentes au plan horizontal (I & VII) ou au plan méridien (X & IV). Les Planètes qui s’y situaient étaient considérées comme ayant l’influence la plus forte et déterminante ;
▶ Maisons succédantes (II, V, VIII & IX) situées à équidistance des plans horizontal et méridien. Les Planètes qui s’y situaient étaient considérées comme ayant une influence moindre que les précédentes ;
▶ Maisons cadentes (III, VI, IX & XII), elles aussi adjacentes au plan horizontal (VI & XII) ou au plan méridien (III & IX). Les Planètes qui s’y situaient étaient considérées comme ayant l’influence la plus faible et la moins déterminante.
Cette classification logique sur le critère d’influence relative (“++” pour les angulaires, “+–” pour les succédantes et “––” pour les cadentes) pose un problème aux limites. En effet dans ce système, Maisons angulaires et cadentes sont contiguës. Cela implique qu’en franchissant la frontière horizontale ou méridienne qui les sépare, une Planète passe sans transition d’un statut “++” à un statut “––” dans le sens sénestrogyre et d’un statut “––” à un statut “++” dans le sens dextrogyre. Or qu’ils fussent sénestrogyristes ou dextrogyristes dans leur conception de la succession des Maisons, en général les astrologues convenaient que ce brutal passage du fort au faible ou inversement ne correspondait pas à ce qui pouvait être observé dans la zone de l’écliptique concernée.
En effet, les données d’observation montraient que les zones d’influence maximale ou minimale des Planètes n’étaient pas délimitées par les frontières entre Maisons angulaires et succédantes, mais chevauchaient celles-ci. Pour résoudre ce problème et donc faire coïncider théorie et pratique, deux solutions s’imposaient aux astrologues confrontés à ce problème :
▶ soit ils conservaient aux Maisons leur pertinence en tant que facteurs de hiérarchisation des puissances planétaires, et dans ce cas il leur fallait en déplacer les limites. Cela impliquait de s’affranchir de l’exactitude de leurs frontières déterminées par des calculs astronomiques ;
▶ soit ils convenaient que les Maisons n’étaient pas des opérateurs adéquats pour déterminer la hiérarchie des puissances planétaires, et dans ce cas il fallait leur substituer un autre système de division de la sphère locale (c’est ce qu’ont fait les Gauquelin en définissant leurs “secteurs”). Ce système se superposerait à celui des Maisons et n’en respecterait pas les délimitations. Il serait constitué de deux types de zones : celles chevauchant les Maisons angulaires et cadentes d’une part, et celles chevauchant les Maisons succédantes d’autre part. Les premières (zones d’angularités) classées “++” délimiteraient l’étendue à l’intérieur de laquelle se situent les Planètes les plus influentes, et les secondes “––” (zones de non-angularité) l’étendue à l’intérieur de laquelle se situent les Planètes les moins influentes. Entre ces deux grandes zones pourraient s’intercaler des zones intermédiaires classées “+–” ou “–+” qui contiendraient les Planètes d’influence intermédiaire.
La seconde solution était la plus logique et la plus conforme aux données d’observation. Ce n’est malheureusement pas celle-ci qui a eu la préférence de la majorité des astrologues. Il est même possible sinon probable que ceux-ci ne l’aient même pas imaginée, tant il paraissait évident pour eux que les Maisons étaient les seules divisions possibles de la sphère locale. Par contre, certains parmi les plus audacieux proposèrent une solution tierce permettant de conserver les Maisons comme opérateurs hiérarchiques. Cette solution consistait dans le fait de décaler toutes les Maisons de 15° ou d’une fraction temporelle équivalente dans le sens dextrogyre. Dans ce système, les limites des des Maisons I, XII, VII & VI se situaient de part et d’autre de l’horizon et celles des Maisons X, IX, IV & III de part et d’autre du méridien.
Les audacieux partisans de cette seconde solution - qui était pourtant la meilleure - ont été minoritaires et c’est donc la première, plus conservatrice, qui a prévalu et qui s’est perpétuée au cours des siècles.
Ceux qui ont fait le choix de cette solution conservatrice se voyaient donc contraints de modifier sensiblement les limites des Maisons afin de faire correspondre la théorie et la pratique. Ces modifications devaient en outre être respectueuses des lois de la géométrie de la sphère locale. Celle-ci était figurée par un cercle dont la division en douze parties égales en espace ou en temps ne pouvait que donner à chaque Maison qu’une étendue de 360°/12 = 30°. Décaler par exemple le début de la Maison I de 5° et donc la faire commencer à 25° de la Maison XII dans le sens sénestrogyre impliquait d’effectuer une rotation uniforme de 5° à toutes les Maisons. De plus, ce découplage du point horoscopique et du début de la Maison I apparaissait à ces conservateurs comme une sorte de sacrilège.
C’est très probablement la raison pour laquelle ils se demandèrent jusqu’où il était leur était permis de ne pas aller trop loin dans cette réforme des limites. C’est une constante dans la longue histoire des conservateurs dans tous les domaines qui se voient contraints par le réel à effectuer des réformes modérées. Les plus audacieux parmi ces timorés proposèrent d’aller jusqu’à un décalage de 10° d’espace ou de 1/6e de temps selon les systèmes de domification auxquels ils se référaient. L’étendue maximale des “lieux” où se situaient les “centres” des puissances planétaires se retrouvait ainsi incluse dans dans ces Maisons largement décalées, et de leur point de vue le problème de l’adéquation entre théorie et observation était ainsi résolu.
Mais les plus conservateurs, qui étaient aussi les moins observateurs, estimèrent que ce décalage de 10° était un accommodement réformateur très exagéré, auquel ils préféraient celui de 5°. Comme ils étaient les plus nombreux, leur opinion l’emporta et devint progressivement la norme qui s’imposa, et il fut admis par la majorité que les débuts de Maisons étaient désormais décalés de 5° dans le sens dextrogyre. Dès lors, la question des “lieux” et de leurs “centres” disparut progressivement, et avec elle toute possibilité théorique d’amender ce système bâtard, mi-chèvre mi-chou, qui dérogeait à l’orthodoxie de la conception des Maisons sans pour autant être aussi cohérent que possible avec les données d’observation.
On ne sait pas quand les sénestrogyristes prirent un… ascendant (sic !) majeur et pérenne sur les dextrogyristes. Rappelons que les premiers étaient partisans du système de Maisons qui ordonne leur succession dans le sens inverse des aiguilles d’une montre (sens AS-FC-DS-MC) et donc du mouvement observable des Planètes autour de l’horizon, alors que les seconds argumentaient en faveur de l’ordre successoral inverse (sens AS-MC-DS-FC) conforme aux rotations planétaires journalières observées. En effet, les documents d’époque faisant état de ces problèmes sont peu nombreux, imprécis, fragmentaires, éparpillés, et d’une datation au mieux très imprécise, au pire inexistante. La reconstitution de ces débats et controverses entre spécialistes reste donc d’ordre conjectural.
Ce qui paraît avéré par l’analyse rétrospective, c’est que les les dextrogyristes semblent avoir été absents des débats qui opposaient les partisans et adversaires du décalage de 5° ou 10°. Cela signifie que la position sénestrogyriste était probablement devenue hégémonique lorsque ces controverses ont eu lieu.
On peut s’interroger sur les raisons de cette absence. Les dextrogyristes étaient pourtant eux aussi concernés par cette problématique qui les conviait à opérer la même rotation de 5° ou 10°, mais pour eux dans l’autre sens. En procédant ainsi, ils auraient été amenés par exemple à accorder une plus grande influence à leur Maison XII (la I des sénestrogyristes) située juste au-dessous du point horoscopique à l’horizon est. Mais on peut penser qu’ils étaient de meilleurs observateurs, puisque pour eux il ne faisait aucun doute que les Planètes se levant au-dessus de l’horizon étaient très influentes, en principe dans toute l’étendue de ce qui était pour eux la Maison I (la XII des sénestrogyristes), ce qui a nettement été confirmé par les statistiques deux millénaires plus tard. Cette qualité de meilleurs observateurs a pu les inciter à accorder une forte influence aux Planètes sur le point de se lever, donc dans leur Maison XII (la I des sénestrogyristes). Il est également possible qu’en héritiers fidèles de la tradition chaldéenne, ils ne se soient pas posé ce genre de question, étant donné que les documents babyloniens connus ne font état d’aucun système de Maisons. Ce ne sont là que déductions rétrospectives et pures conjectures. En vérité, on ne saura jamais avec certitude ce qui s’est réellement passé.
On ne sait rien non plus de la position qui fut celle des dextrogyristes à propos du système des Maisons autocentrées. Rappelons que les partisans de ce système étaient les plus fortement réformateurs, puisque pour eux il s’agissait de rien moins que d’une redéfinition radicale du positionnement des Maisons. Dans leur optique, les Maisons n’étaient plus définies par leurs limites, mais par leur centre. Le point horoscopique horizontal n’était ainsi plus le début de la Maison I (ou de la XII pour les sénestrogyristes), mais en devenait le centre. Il va de soi qu’ainsi les limites de toutes les autres Maisons étaient également décalées de 15°. Pour ne prendre que le cas des Maisons “angulaires”, la Maison I se retrouvait ainsi à cheval sur l’horizon est, la Maison X à cheval sur le méridien supérieur, la Maison VII à cheval sur l’horizon ouest et la Maison IV à cheval sur le méridien inférieur.
La ressemblance de ces antiques Maisons autocentrées avec les “secteurs-clés” des statistiques Gauquelin réalisées à partir d’études informatisées en 1984 est très frappante :
Cette solution radicale permettait d’en finir avec l’ancien problème des “centres” et des “lieux” extérieurs aux Maisons où ils auraient du se trouver pour que théorie et pratique correspondent. En effet, “centres” et “lieux” étaient désormais contenus à l’intérieur de ces Maisons centrales, et donc confondus avec elles. Les débats ne portaient plus que sur leur positionnement. La seule question qui se posait était de savoir si le “centre” de puissance planétaire était confondu avec celui de la Maison I centrale, ou s’il était excentré au-dessus ou au-dessous de l’horizon. Dans le premier cas, une Planète était à son maximum de puissance lorsqu’elle était exactement située sur l’horizon. Dans le deuxième cas, l’excentration au-dessus de l’horizon était probablement la solution la plus couramment admise, étant donné que c’était justement cette position planétaire qui était à l’origine de la redéfinition des Maisons par leur centre. Il est néanmoins probable que les moins hardis aient plaidé pour un “centre” sous l’horizon, pour ne pas trop se couper de l’ancienne définition de la Maison I sénestrogyre.
Comme on l’a déjà exposé, cette rotation dextrogyre de 15° permettait de déterminer 4 Maisons majeures centrées respectivement autour de l’ascendant (AS), du méridien supérieur (MC), du descendant (DS) et du méridien inférieur (FC). Elle rendait également possible le maintien de la distinction entre Maisons angulaires, succédantes et cadentes, mais en en bouleversant l’ordre successoral, en effet :
▶ les Maisons angulaires contenant les centres AS, MC, DS et FC avaient la plus grande influence “++” pour la détermination des Planètes dominantes ; les Maisons succédantes devenaient dans ce système celles qui étaient contiguës aux précédentes et avaient une moindre influence “+–” ou “–+” et donc conféraient aux Planètes qui s’y trouvaient une moindre puissance relative ;
▶ les Maisons cadentes se retrouvaient contiguës aux précédentes, avaient par donc une plus faible influence “––” qu’elles, et conféraient aux Planètes qu’elles contenaient la plus faible puissance relative, faisant de celles-ci des non-dominantes.
Ce système aurait été très logique et aurait très bien rendu compte des données d’observation, mais il n’a pas été imaginé par les astrologues de cette époque ni même développé, ainsi qu’il vient d’être fait, par ses partisans minoritaires. La raison de cet abandon réside peut-être dans le fait qu’il apparaissait comme trop hérétique par rapport à une conception conservatrice des Maisons, qui était déjà devenue peu ou prou “traditionnelle” et donc très difficile à remettre aussi radicalement en question. C’est très dommage, étant donné que ce système des Maisons autocentrées était le seul qui aurait pu mettre d’accord dextrogyristes et sénestrogyristes au moins sur un point essentiel.
Le diagramme ci-dessous représente les zones d’angularité comparées des trois systèmes. Sa forme d’étoile à quatre branches à la symétrie parfaite et idéale est une représentation stylisée des zones d’angularité planétaires dont les statistiques ont permis de faire apparaître le profil expérimental imparfait mais réel. L’étoile orange représente les zones d’angularités sénestrogyristes selon l’astrologie “traditionnelle”, la bleue les zones communes aux astrologues dextrogyristes pré-ptoléméens et aux statistiques Gauquelin, et la rouge les zones idéales déterminées les axes horizontal et méridien. La zone du réel des dominantes planétaires observées se situe entre l’étoile rouge et la bleue.
Au IIe siècle, Ptolémée expose dans sa Tétrabible les théories et pratiques astrologiques de ses prédécesseurs. Il ne fait qu’une brève référence au système sénestrogyre de numérotation des Maisons, qu’il valide sans s’y attarder, et aucune allusion au système dextrogyre et aux Maisons autocentrées. Alors qu’il n’est pourtant pas avare d’explications rationalisantes si ce n’est toujours rationnelles, et qu’il se réfère très fréquemment à l’astronomie pour légitimer les théories et pratiques astrologiques, il ne juge ni utile ni nécessaire d’expliquer pourquoi il a fait ce choix exclusif. Un choix qui a eu pour conséquence de faire croire, étant donné l’énorme influence de son œuvre qui fut pendant des siècles une référence majeure, que le référentiel sénestrogyre était le seul, alors que c’est une contre-vérité historique et épistémologique.
Nous allons voir que ce choix des maisons sénestrogyres a eu de considérables conséquences sur la détermination des puissances planétaires, laquelle est liée à la présence des Planètes dans certaines Maisons, non pas en raison des significations attribuées à celles-ci, mais en raison de leur proximité avec l’horizon et le méridien. Nous y reviendrons.
Pour la clarté de l’exposé qui suit et afin d’éviter toute confusion, nous nous référerons au système de numérotation sénestrogyre des Maisons devenu “classique” et “traditionnel” parce qu’il a été celui que Ptolémée a retenu et pour aucune autre raison.
Ces controverses qui agitaient les astrologues de cette époque pré-ptoléméenne peuvent apparaître comme dérisoires, irrationnelles et byzantines pour un observateur extérieur et donc non averti de ce qu’elles révèlent et dissimulent. Elles étaient pourtant les fruits multiples d’un questionnement unique et essentiel. Il s’agissait en effet de rien de moins que de définir aussi précisément que possible les limites des zones d’angularité horizontales, cette définition affectant aussi géométriquement celles des zones d’angularités méridiennes. Pour ces anciens astrologues, le problème des limites des zones d’angularité se confondait avec celui des frontières des Maisons dans leur définition astronomique et dans leurs significations astrologiques. Et c’est précisément à ce problème auxquels les astro-statisticiens comme Paul Choisnard, Léon Lasson et les Gauquelin se sont retrouvés confrontés deux millénaires plus tard.
Ptolémée ne mentionne pas ces controverses dans sa Tétrabible, qui deviendra à partir du IIe siècle l’ouvrage de référence pour des générations d’astrologues. Il est pourtant assez peu probable qu’il en ignorait l’existence. On ne s’étendra pas ici sur les raisons de cette absence : ce ne seraient que de vaines conjectures. On se contentera de retenir sa position objective : il a opté pour des Maisons sénestrogyres dont il a décalé les limites de 5° dans le sens dextrogyre au-dessus de l’horizon comme d’autres avant lui. Cela signifie que pour lui, la Maison I a une étendue de 30° qui commence à 25° de la Maison XII et se termine à 25° de la Maison I, toutes les autres Maisons étant affectées par ce décalage. Il s’ensuit qu’il ne considère une Planète ascendante à l’horizon comme dominante qu’à l’intérieur de cette étendue.
Cependant Ptolémée est ainsi confronté à un gros problème logique. En effet, il considère en général que les effets planétaires sont renforcés au-dessus de l’horizon, et amoindris au-dessous, ce qui a effectivement été confirmé 20 siècles plus tard par les études statistiques. Mais dans le même temps il considère que la Maison I, sous l’horizon pour ses 5/6e comme il la définit, est après la Maison X située avant le méridien supérieur, la deuxième en importance pour juger des puissances planétaires en fonction de leurs positions dans les Maisons “angulaires”.
Il se retrouve donc face à une aporie. En effet, soit la règle générale que lui même édicte est que les Planètes sont plus puissantes au-dessus de l’horizon, et dans ce cas il est obligé de reconnaître que cette règle ne s’applique qu’aux Planètes ascendantes situées dans le 1/6e de la Maison I débordant sur la Maison XII, ce qu’il ne fait pas ; soit il considère que le statut majoritairement nocturne de la Maison I est une exception qui confirme la règle générale. C’est ce qu’il fait, et pour justifier ce choix, il convoque piteusement un argument pseudo-physique ad hoc. Cet argument irrationnel est le suivant : les Planètes ascendantes en Maison I, donc sous l’horizon, seraient plus puissantes que celles ascendantes en Maison XII parce que les brumes et vapeurs au-dessus de l’horizon affaibliraient celles-ci en occultant leurs effets.
C’est du grand n’importe quoi. Le problème ici n’est pas celui de la pertinence physique de l’argument en soi, étant donné que les anciens admettaient sans problème que les vapeurs terrestres puissent monter jusqu’aux astres et affecter leurs propriétés. Le problème est que cet affaiblissement planétaire pour cause de vapeurs terrestres devrait en toute logique s’appliquer aussi au 1/6e de la Maison I situé au-dessus de l’horizon, et même surtout à celui-ci étant donné qu’il est le plus proche de ces exhalaisons brumeuses. De plus, si l’on convoque les brumes matinales pour expliquer cette exception à la règle, on peut en faire autant pour les brumes vespérales, qui affecteraient alors toutes les Planètes situées dans la Maison VII, elle aussi “angulaire” mais qui se trouve au-dessus de l’horizon ouest.
L’argument pseudo-physique de Ptolémée ne vaut donc rien. Mais l’admettre ruinerait du coup le décalage ad hoc de 5° effectué pour rendre compte a minima de la puissance attribuée aux Planètes qui viennent juste de se lever et ne sont par conséquent plus sous l’horizon… Placé devant cette aporie irrésoluble, Ptolémée n’admet rien. Il poursuit ses raisonnements sans se soucier de cette contradiction flagrante à l’intérieur du système qu’il défend. Et c’est sans aucun doute en raison de cette aporie qu’il a décidé de faire de la Maison X attenante au méridien supérieur la principale Maison “angulaire” : le mitan du jour ne pose par définition aucun problème de vapeurs matinales ou vespérales…
Cette position défendue par cet argument irrationnel désigne sans aucun doute Ptolémée comme, soit un pur théoricien faisant avec réticence un léger accroc à l’orthodoxie astronomique dans la définition des limites des Maisons, soit un praticien très épisodique doublé d’un très piètre observateur, les deux excès ou carences pouvant bien entendu se cumuler.
À la lecture de la Tétrabible, cela ne fait guère de doute. Il n’est donc pas impossible qu’il ait perçu les controverses de ses prédécesseurs comme d’irrationnels et vulgaires débats de praticiens ras-de-terre sans rigueur théorique. Il se trompait lourdement et a entraîné dans son sillage ses successeurs qui ont pris cette erreur pour argent comptant. L’erreur de Ptolémée est devenu la doxa des astrologues. C’est même pire que cela : des enseignements riches, complexes et contradictoires de l’œuvre de Ptolémée, ceux qui en ont fait leur bible n’en ont pour la plupart retenu que cette erreur. Pire encore, dans leur hiérarchisation des Maisons “angulaires”, ils ont fait passer la Maison I avant la X pour la seule raison qu’elle contient le point horoscopique.
Voici en effet ce qu’écrivait à ce sujet Ptolémée : “On évalue le pouvoir des planètes, en premier lieu, à partir de deux considérations : soit elles sont orientales et accroissent leur propre mouvement - car elles sont alors très puissantes - soit elles sont occidentales et diminuent leur mouvement - car alors elles ont une énergie plus faible. En second lieu, à partir de leur position par rapport à l’horizon, car, lorsqu’elles sont au Milieu-du-Ciel ou qu’elles le suivent immédiatement, elles sont particulièrement puissantes. Elles ont une force moindre, en revanche, quand elles sont exactement sur l’horizon ou qu’elles le suivent immédiatement. Leur pouvoir est plus grand chaque fois qu’elles sont en l’horizon oriental, et moindre chaque fois qu’elles culminent sous la Terre ou qu’elles sont dans une autre configuration avec le lieu qui se lève (l’Ascendant). Mais, si ce n’est pas le cas, leur pouvoir est nul” (Claude Ptolémée, Le Livre unique de l’astrologie ou Tétrabible, Livre I, chap. 24).
Ce texte mérite d’être analysé en détail, car il résume à lui seul toute l’absurdité du système de Maisons sénestrogyre quand il est combiné à la rotation journalière dextrogyre des Planètes autour de l’horizon.
En effet Ptolémée y affirme à la fois que les Planètes orientales sont plus puissantes que les occidentales et que celles sur leur arc diurne (au-dessus de l’horizon) sont plus puissantes que celles sur leur arc nocturne (sous l’horizon). Il devrait logiquement en découler que les planètes du quadrant oriental diurne (du lever à la culmination supérieure, Maisons XII, XI & X) sont les plus puissantes. Or seules les planètes en Maison X et celles situées dans le dernier 1/6e de la Maison XII sont pourtant considérées comme telles par le même Ptolémée, alors que les Planètes en Maison XII sont elles aussi dans leur mouvement diurne croissant et situées en l’horizon occidental. S’il était logique à l’intérieur de son propre système, il devrait considérer que les Planètes en Maison VII, donc diurnes, ont une puissance supérieure à celles en Maison I, donc nocturnes. Or il n’en est rien : Ptolémée affirme au contraire que les Planètes en Maison VII ont une puissance moindre que celles en Maison I. Enfin il affirme que les Planètes en dehors des Maisons X, I & VII ont un “pouvoir nul”, alors même que la Maison IV adjacente au méridien inférieure est “angulaire”, donc considérée par lui-même comme ayant un pouvoir valorisant sur les Planètes qui s’y trouvent.
Enfin, le système de Maisons sénestrogyre qu’il a adopté et même amendé le contraint à faire une description du mouvement journalier opposée au réel de la rotation observable des Planètes autour de l’horizon. En effet, ce système l’oblige à écrire qu’une Planète en Maison X suit immédiatement sont passage au méridien supérieur, alors que ce qui se passe est exactement l’inverse : dans la réalité de la sphère locale qui est celle du mouvement dextrogyre, une Planète en Maison X se situe dans la phase qui précède immédiatement sa culmination supérieure, et non qui la suit. Si Ptolémée avait adopté le beaucoup plus réaliste système dextrogyre que nombre de ses prédécesseurs prônaient, il aurait évité ce genre de contradiction flagrante.
Suite et fin : les suiveurs et suivistes de Ptolémée firent du décalage de 5° des limites des Maisons sénestrogyres avalisé - et institué, étant donné son autorité en la matière - un dogme intouchable. Selon ce dogme, toute Planète située au-dessus de l’horizon en Maison XII à plus de 5° de la cuspide de la Maison I ou point horoscopique est considérée comme “très faible”. Il en est de même par exemple pour une Planète en Maison X : elle n’est considérée comme angulaire et donc dominante que si elle est située dans une zone comprise entre les premiers 5/6e de cette Maison et le dernier 1/6e de la Maison IX si l’on compte dans le sens dextrogyre. Depuis la redécouverte de la Tétrabible au Moyen Âge, on trouve ce dogme dans tous les textes astrologiques, à quelques très rarissimes exceptions près. Il ne sera ébranlé, rappelons-le, que par les premières astro-statistiques du XXe siècle.
Il a très probablement existé au cours des 3 ou 4 derniers siècles des astrologues praticiens, qu’ils soient de simples observateurs objectifs et critiques, voire ayant eu accès à des documents d’archives pré-ptoléméens, qui ont mis en doute ce dogme en le confrontant avec leur expérience d’interprètes et/ou avec d’autres textes traditionnels. Ceux-là ont pu se rendre compte in vivo que des Planètes situées en Maisons XII, IX, VI & III, jugées “très faibles” selon la tradition relayée par Ptolémée, étaient en fait “très fortes” dans le fonctionnement des individus dont le Thème natal comportait ce genre de caractéristique. Mais s’ils ont existé, ils n’ont pas laissé de traces écrites connues.
Leur existence hypothétique peut certes sembler n’être qu’une pure conjecture qui ne pourra probablement jamais être confirmée. Pour être objectif, je dois reconnaître que cette conjecture se fonde sur mon expérience personnelle d’astrologue praticien. En effet, lorsque j’ai débuté l’étude et la pratique de ce savoir, pendant quelques années je ne pouvais me fonder que sur les manuels qu’on pouvait trouver dans les librairies. Et tous sans exception répétaient le dogme ptoléméen des angularités planétaires (je précise qu’en plus je n’avais pas lu la Tétrabible à cette époque). Je l’ai donc appliqué pour faire l’interprétation de très nombreuses cartes du ciel de membres de ma famille, d’amis proches et de connaissances plus lointaines. Et dans de nombreux cas, j’ai remarqué que des Planètes considérées comme “très faibles” en application de ce dogme apparaissaient comme “très fortes” dans ce que je pouvais observer du fonctionnement de ces personnes.
Mais j’ai au départ douté de mes propres observations, les mettant sur le compte de mon inexpérience de débutant qui ne me permettait pas de remettre en cause les enseignements d’astrologues auteurs de manuels, dont j’imaginais à l’époque alors qu’ils étaient beaucoup plus savants et expérimentés que moi. Ce n’est que lorsque j’ai découvert l’existence des travaux statistiques des Gauquelin que je me suis permis de penser que mes observations étaient peut-être réellement fondées sur des faits objectifs. Je suis donc fondé à penser que de nombreux autres astrologues ont pu faire les mêmes observations que les miennes, et adapter le dogme ptoléméen à leur pratique. C’est là une conjecture tout-à-fait réaliste et raisonnable.
L’un des apports majeurs des statistiques Gauquelin a donc été, sans que ceux-ci l’aient su ni surtout voulu, d’une part de donner partiellement raison aux partisans du système des Maisons dextrogyres et donc aux valorisations planétaires observées par les Chaldéens et de nombreux astrologues grecs pré-ptoléméens, et d’autre part de donner partiellement raison aux partisans des Maisons autocentrées, auxquelles les “secteurs-clés” Gauquelin ressemblent très fortement dans leurs étendues. Ce faisant les études Gauquelin ont ainsi objectivement réhabilité les positions des astrologues pré-ptoléméens les plus observateurs et permis de corriger l’erreur fondamentale de Ptolémée. Il est bien entendu impossible de le constater si on ne connaît pas l’histoire des conceptions astrologiques.
Les Gauquelin n’ont il est vrai pas œuvré pour obtenir un tel résultat. Ils ont toujours en effet été convaincus que leurs statistiques avaient en la matière ruiné un postulat de base de l’astrologie en général. Alors qu’en fait, elles n’avaient fait que partiellement invalider le choix erroné des Maisons dextrogyriques de Ptolémée, devenu au cours des siècles la doxa des astrologues traditionalistes dans les écrits lesquels ils ont puisé leurs illusions de savoir. Cela constitue un cas particulier de sérendipité paraxoxale, la sérendipité étant le fait trouver autre chose que ce que l’on cherchait et le caractère paradoxal résidant dans le fait que les Gauquelin ne se sont même pas apeçu qu’ils avaient découvert autre chose que ce qu’ils pensaient avoir trouvé.
Dijon, le 14 juin 2019.
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Les significations planétaires
par
620 pages. Illustrations en couleur.
La décision de ne traiter dans ce livre que des significations planétaires ne repose pas sur une sous-estimation du rôle des Signes du zodiaque et des Maisons. Le traditionnel trio Planètes-Zodiaque-Maisons est en effet l’expression d’une structure qui classe ces trois plans selon leur ordre de préséance et dans ce triptyque hiérarchisé, les Planètes occupent le premier rang.
La première partie de ce livre rassemble donc, sous une forme abondamment illustrée de schémas pédagogiques et tableaux explicatifs, une édition originale revue, augmentée et actualisée des textes consacrés aux significations planétaires telles qu’elles ont été définies par l’astrologie conditionaliste et une présentation détaillée des méthodes de hiérarchisation planétaire et d’interprétation accompagnées de nombreux exemples concrets illustrés par des Thèmes de célébrités.
La deuxième partie est consacrée, d’une part à une présentation critique des fondements traditionnels des significations planétaires, d’autre part à une présentation des rapports entre signaux et symboles, astrologie et psychologie. Enfin, la troisième partie présente brièvement les racines astrométriques des significations planétaires… et propose une voie de sortie de l’astrologie pour accéder à une plus vaste dimension noologique et spirituelle qui la prolonge et la contient.
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Pluton planète naine : une erreur géante
par
117 pages. Illustrations en couleur.
Pluton ne fait plus partie des planètes majeures de notre système solaire : telle est la décision prise par une infime minorité d’astronomes lors de l’Assemblée Générale de l’Union Astronomique Internationale qui s’est tenue à Prague en août 2006. Elle est reléguée au rang de “planète naine”, au même titre que les nombreux astres découverts au-delà de son orbite.
Ce livre récapitule et analyse en détail le pourquoi et le comment de cette incroyable et irrationnelle décision contestée par de très nombreux astronomes de premier plan. Quelles sont les effets de cette “nanification” de Pluton sur son statut astrologique ? Faut-il remettre en question son influence et ses significations astro-psychologiques qui semblaient avérées depuis sa découverte en 1930 ? Les “plutoniens” ont-ils cessé d’exister depuis cette décision charlatanesque ? Ce livre pose également le problème des astres transplutoniens nouvellement découverts. Quel statut astrologique et quelles influences et significations précises leur accorder ?
Enfin, cet ouvrage propose une vision unitaire du système solaire qui démontre, chiffes et arguments rationnels à l’appui, que Pluton en est toujours un élément essentiel, ce qui est loin d’être le cas pour les autres astres au-delà de son orbite. Après avoir lu ce livre, vous saurez quoi répondre à ceux qui pensent avoir trouvé, avec l’exclusion de Pluton du cortège planétaire traditionnel, un nouvel argument contre l’astrologie !
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