Vous trouverez peu d’ouvrages sur l’histoire de l’astrologie. Ils sont rares. À tel point que si vous disposez de l’un d’eux dans votre bibliothèque, il pourrait disparaître par enchantement. Les astrologues-astronomes, avant le XVIIe siècle, usaient du rationnel de leur science pour l’appliquer à l’irrationnel de leur art, ont à moitié disparu de nos dictionnaires. On n’en voit plus que l’émergence astrométrique. Où sont passés les astrologues ? II faut un peu de perversité pour retrouver leurs cendres sous de nouvelles définitions biographiques. Presque tous, sous des plumes d’exorcistes, sont devenus “philosophes”… Nos enfants et adolescents sont tendrement défendus contre les mauvaises lectures. Sauront-ils jamais — à moins d’être dévoyés — que Jérôme Cardan (1501–1576), “philosophe, médecin et mathématicien” selon le Dictionnaire universel des noms propres, inventeur du dispositif d’articulations qui porte son nom (le cardan) était astrologue ? En clair, le mécanisme ne devrait pas marcher… Pas plus que les idées, découvertes, essais, d’autres “philosophes” à la Cardan, ne devraient tenir la route…
On n’aura jamais autant bu, dit-on, que sous la prohibition. Nos exorcistes, loin de supprimer les démons interdits de la philosophie, ont provoqué un déferlement d’astrologies tous azimuts, toutes tendances. Cardan a fait des petits… II paraît tard pour arrêter la vague, réifier les digues de la raison contre cet excès de philosophie. Comble de menaces sur l’avenir nos barrières, leurs constructeurs n’ont pas changé de méthodes.
Leur inefficacité démontrée par la prolifération des associations et écoles d’astrologie n’a toujours pas convaincu les censeurs qu’il valait mieux ouvrir publiquement le débat : informer réellement sur l’astrologie, son histoire, ses hommes, ses différentes conceptions, au lieu de retenir les cancres, les échecs, les aberrations faciles à réfuter ; rappeler ce que l’astronomie moderne doit aux précurseurs astronomes-astrologues plutôt que se déshonorer en leur prêtant des adjurations de dernière heure ; dire, avant qu’advienne le siècle éphémère des Lumières, combien les astrologues et l’astrologie, ni plus ni moins funestes que d’autres croyances (le moins l’emporterait) ont été présents, plutôt que d’en purger honteusement l’histoire ou l’écrire à l’enseigne des dialectiques unilatérales. Parler enfin du zodiaque des Signes et des constellations sans escamoter le point de vue et la pratique des astrologues.
Ce que nous allons faire. Le propos de ce livre étant les douze Signes, autant rappeler ce qu’ils sont par rapport aux groupements d’étoiles qui portent les mêmes noms, ce qui fait leur différence et quel phénomène les a séparés dans l’esprit des hommes…
Parmi les multiples articles de sociologie amusante que la grande presse consacre à l’astrologie durant les périodes de vacances et jours fériés, en décembre 85 L’Express se demandait encore s’il fallait y croire… En contrepartie d’un article axé sur les astrologies symbolisantes, l’astrophysicien Hubert Reeves, sans être un chasseur de sorciers, se laissait dire : “Je ne suis pas convaincu qu’il y ait un rapport réel entre l’astrologie et les astres. Par exemple, étant né le 13 juillet, les astrologues me disent que je suis Cancer. Ce qui devrait impliquer que le Soleil, à ma naissance, se trouvait dans la constellation du Cancer. C’était vrai il y a deux mille ans. Ça ne l’est plus aujourd’hui. À ma naissance, le Soleil était dans les Gémeaux. Ça me gêne, bien que l’on m’ait donné des ‘explications’.”
Passons sur la gêne des explications, plutôt singulière quand on sait tout ce que les scientifiques s’autorisent en matière d’hypothèses de travail… et de tout repos ! Observons seulement l’élimination du mot “Signe”. Hubert Reeves veut bien naître au passage du Soleil dans une constellation (celle des Gémeaux) mais pas dans un signe (le Cancer). Or, les astrologues lui ont parlé du Signe et non de la constellation. Le mot “Signe” n’aurait-il jamais existé en astrométrie ou après la mutation de l’astrologue en philosophe, assistons-nous à une nouvelle mutation en terminologie appliquée ? Y aurait-il alors des gènes inconnus dans les mots d’usage ? Il faut préciser que la mort du Signe, déplaisante au poète, arrangerait l’espèce scientiste en phase dominante. De même qu’il n’y aurait jamais eu d’astronome-astrologue puisque, sans le savoir, ils étaient philosophes, il n’y a jamais eu de constellation-Signe… puisque, sans le savoir les Signes étaient des étoiles. Pourquoi parler de Signes et de différences ?
Ce joli coup de Jarnac porté au vocabulaire comme au patrimoine culturel est assez récent. Il n’est pas sûr que la manœuvre se généralise, les mots nouveaux ont la fragilité des chérubins et des incroyables mais vains. Ainsi, le vénérable Calendrier des Postes indique toujours, en 85 et 86, les dates et heures (en temps universel) d’entrée du Soleil dans les Signes du zodiaque, tandis que le Calendrier astronomique s’abstient de ces indications hérétiques. De quelles chimères faut-il nourrir sa rancœur pour croire au pouvoir des mots contre les faits ? En 1968, l’Annuaire du Bureau des longitudes indiquait encore, comme le Calendrier des Postes, les dates et heures d’entrée du Soleil dans les Signes, ainsi que des planètes… Depuis, c’est à craindre, l’Annuaire s’est sans doute aligné sur le petit livre rouge de l’anti-astrologie insidieuse.
En modifiant les définitions, les nouveaux astromètres éliminent verbalement les contradictions qui gênaient leurs aînés, mais ni l’histoire ni les données du problème n’ont changé. La précession des équinoxes est toujours là.
Voyons-en les termes. Précession d’abord. Lorsque Pierre marche devant Paul et Paul devant Jacques, Pierre précède Paul et Jacques, Paul précède Jacques. Entendu. Comme précéder, l’origine latine de précession est praecedere, “marcher devant”. Sur ce point, s’agissant de phénomènes physiques et non de personnes, nos dictionnaires n’introduisent pas leurs fantasmes.
Passons aux équinoxes. Le terme se compose du latin aequus, “égal”, et nox, “nuit”. Tout ceci étant difficilement contestable, on en déduit, en accord avec le Petit Larousse, que l’équinoxe marque l’époque de l’année “…où le Soleil, dans son mouvement propre apparent sur l’écliptique, coupe l’équateur céleste”, ce qui entraîne, dans l’absolu et non dans le réel (il y a toujours des divergences entre les deux), l’égalité des jours et des nuits (12 heures dans chaque camp, match nul).
Le point de l’équateur céleste où se produit ce passage se désigne par “point vernal” ou “point gamma” qui se définit par l’intersection des plans d’écliptique et d’équateur. Lorsque le centre du disque solaire coïncide avec le point vernal (de ver, “printemps”), en temps universel, il est officiellement 0 heure 0 minute 0 seconde dans la vie du printemps de l’hémisphère Nord, ce qui ne décide nullement de ce que sera la saison en chauds et froids, à moins de faire son horoscope… ce qui fait partie des pratiques astrologiques traditionnelles.
Le point vernal détermine par ailleurs le degré zéro du Signe du Bélier, premier Signe du zodiaque. Si vous avez besoin de visualiser ces définitions, reportez-vous à la figure 1. Vous trouverez, aux deux intersections de l’équateur céleste et de l’écliptique :
▶ 1°) Le point vernal (ou point gamma), équinoxe de printemps, origine 0° du Bélier et des Signes qui lui succèdent.
▶ 2°) Son vis-à-vis, à 180° (ou gamma prime), équinoxe d’automne, origine 0° du Signe de la Balance.
En joignant les deux points gamma, on obtient l’axe des équinoxes. La Terre en occupe le centre, mais il n’a de réalité que sur le papier. Dans son mouvement apparent, le Soleil se déplace sur l’écliptique d’ouest en est, soit dans le sens contraire aux aiguilles d’une montre et au mouvement apparent quotidien. Sa marche annuelle le porte à renouveler le printemps au tour suivant… Un tour qui ne sera pas exactement de 360° puisque le point vernal est allé à sa rencontre à la vitesse peu sensible de 50,25″ d’arc par an (1° en 72 ans, 30° en 2 147 ans, 360° en 25 760 ans que l’on arrondit souvent à 26 000). 50,25″ d’arc, ce n’est pas rien, presque. Cela suffit pour que le moment de l’équinoxe avance chaque année de 20 minutes par rapport à l’année précédente, d’où ce terme explicite de précession… venir avant. Il implique que le Soleil au printemps de l’An II n’occupe pas, parmi les étoiles, la même position qu’au printemps de l’An I, et qu’il paraisse au fil des siècles “se promener à travers les constellations zodiacales, celles qui contiennent l’écliptique. Ainsi, au temps d’Hipparque, 130 ans avant J.-C., le Soleil apparaissait à l’équinoxe du printemps dans le Bélier, tandis qu’il coïncide aujourd’hui avec la constellation des Poissons.”
Si l’on parle de l’avance du point vernal vers le Soleil, il s’agit de précession. Si l’on parle de son recul par rapport à un repère stellaire, on formule le même phénomène en termes de rétrogradation du point vernal.
Lorsque le Soleil retrouve le point vernal, les durées de jour et nuit restent égales comme durant les millénaires de printemps précédents… Cette égalité ne se produit plus sous le parrainage des mêmes étoiles. Si vous avez de la gêne à comprendre, Hubert Reeves, qui est un excellent vulgarisateur lorsqu’il ne s’agit pas d’astrologie, vous expliquera ce qu’est un “référentiel”. En revanche, si vous avez compris, expliquez-lui.
Puisque nous avons deux repères pour mesurer le temps — le retour au point vernal (mobile) et le retour au même point par rapport aux étoiles — nous avons au moins deux années (il y en a d’autres) :
▶ l’année tropique est l’intervalle de temps entre deux passages du Soleil par le point vernal ou d’un printemps à l’autre. Sa durée moyenne s’exprime en jours moyens par 365,242 198 79 soit : 365 j 5 h 48 m 46 s. ;
▶ l’année sidérale est le temps que met le Soleil à venir occuper un même point (d’une année à l’autre) par rapport aux étoiles et sa durée s’exprime en jours moyens par 365,263 360 42 jours, soit 365 j 6 h 9 m 10 s.
On dit autrement que : l’année tropique correspond au temps mis par le Soleil pour que sa longitude augmente de 360° à partir de l’équinoxe mobile. Tandis que l’année sidérale correspond au temps mis par ce même Soleil pour qu’il augmente de 360°, à partir d’un équinoxe fixe. Enfin, sachant que, dans une année tropique, la longitude du Soleil n’augmente en réalité que de 360° − 50,26″ on pose la proportion : année sidérale / année tropique = 360° / 360° − 50,26’’ qui permet, évidemment, de retrouver la durée d’une année en toute connaissance de l’autre.
Les explications physiques de la précession mettent en cause les attractions de la Lune et du Soleil sur le renflement équatorial de la Terre. On compare le résultat au mouvement d’une toupie tournant rapidement sur elle-même : son axe de rotation décrit un cône dans l’espace en conservant la même inclinaison. Pour l’axe terrestre les mouvements sont moins simples. Les valeurs et directions des forces soli-lunaires (les planètes ont aussi leur rôle) étant variables, au mouvement conique de précession suivi par l’axe terrestre en 26 000 ans (moyenne), se combine une oscillation dite “nutation” principalement due à la Lune et dont la période est de 18,6 ans. “De ce fait, les pôles célestes décrivent dans le ciel une trajectoire légèrement ondulée le long d’un cercle parallèle à l’écliptique, centre sur le pôle de l’écliptique et d’un rayon de 23° 26′ 1″.”
Le phénomène de précession a été découvert par Hipparque de Rhodes (IIe siècle avant J.-C.). Celui de la nutation par l’astronome James Bradley (1692–1792), le meilleur en Europe selon Newton (on lui doit également la découverte de l’aberration de la lumière).
Pour ne vous laisser aucune illusion quant à la complexité des choses du ciel, il faut savoir que l’écliptique n’est pas parfaitement fixe. L’attraction gravitationnelle des planètes provoque un lent déplacement de ce plan. Toujours en raison des perturbations “secondaires” mais apparemment non négligeables que créent les planètes — en s’ajoutant aux autres perturbations —, l’obliquité de l’écliptique change aussi lentement et la durée du cycle de précession n’est pas constante…
Après le phénomène et ses causes, voyons les conséquences. Le pôle céleste Nord traverse en 26 000 ans différentes constellations… “polaires”. Alors que l’étoile Polaire indique sensiblement la direction du nord de nos jours, en l’an 14000 le pôle Nord sera dans la direction de Véga. Il est étonnant que les astrologues amateurs de sensationnel n’aient pas encore pensé à utiliser ce déplacement parmi les étoiles pour prophétiser des ères historiques. Or, manifestement, après l’an 2000, nous serons dans l’ère de Céphée, et non plus de la Petite Ourse en voie d’achèvement.
Les Signes sont en réalité des “phases” caractéristiques d’un cycle, alors que les constellations caractérisent des régions en proposant leurs repères. Est-il possible que les troubadours de l’espace-temps einsteinien ne comprennent pas ? On a beau avoir la barbe et la tête dans les étoiles, les viscères restent près du sol quand il s’agit de régler ses histoires de famille. Et il ne faut pas oublier que l’astronomie doit ses origines aux astrologues-astronomes de Sumer. Ce doit être dur d’avoir une maman irrationnelle quand on est prophète du rationnel… Ou alors ça explique tout.
Imaginons maintenant que Pierre s’appelait Vernal-Bélier, il y a environ deux mille deux cents ans, et sa suite Paul-Taureau, Jacques-Gémeaux. Pierre, ne sachant pas qu’il trottait menu parmi les étoiles, eut la fâcheuse idée de donner son nom à celles qui emplissaient son cadre. Depuis, comme son cadre a changé, on dit de Pierre qu’il n’existe plus et n’a jamais existé. Personne, paraît-il, n’aurait l’idée de transmettre son nom à des étoiles… Ce ne sont ni nos enfants, ni nos œuvres, ni nos biens… et la science a prouvé que l’homme est logique. Oui. Voilà où est la clef de ce débat digne des sophistes : qui a donné le nom à l’autre ? Le Signe à la constellation, ou la constellation au Signe ? À vrai dire le simple énoncé nominatif des douze Signes répond à la question. Mais ne nous privons pas d’une plus ample démonstration.
Une caractéristique universelle des corps physiques, du plus petit jusqu’au plus grand, parait être de tourner sur lui-même et autour d’un autre qui en fait autant. Et quand on ne tourne pas, on dépend au moins d’un corps — le plus souvent plusieurs — qui tourne.
Notre Terre mère tourne autour de son axe en 23 heures 56 minutes 4,1 secondes en jour solaire moyen, et en 365,26… jours solaires moyens autour du Soleil (révolution sidérale). Son orbite se représente par une ellipse de très faible excentricité. En réalité, selon le principe de l’arroseur arrosé et du tourné tournant, le Soleil étant lui-même entraîné dans une révolution de 200 millions d’années autour du centre de la galaxie, les planètes de son cortège décrivent des spirales et non pas des ellipses.
Dans ce voyage dont nous ne sommes que d’éphémères passagers, la Terre se déplace sur un fond d’étoiles… un merveilleux décor que par convention nous avons projeté sur une sphère de rayon sans dimension. On qualifie parfois cette sphère céleste de sphère des fixes, les “fixes” désignant les étoiles. Mais l’adjectif se perd un peu. On n’ose en user lorsqu’on songe aux théories cosmologiques qui font fuir les galaxies à des vitesses fantastiques, proportionnelles à leurs distances, et ce depuis que le monde est né, il y a 15 à 16 milliards d’années, d’un effrayant big-bang que seul Dieu le père a peut-être entendu.
Par rapport à l’observateur terrestre, il y a des galaxies, donc des étoiles, dont la distance implique une vitesse de fuite égale à celle de la lumière (299 792,6 km/s). Au-delà de cette distance de 1023 km, l’univers n’est plus visible. Ces étoiles au bord du vertige ne nous adressent d’elles-mêmes que des images du passé… des photos jaunies (ou rougies) par les années-lumière qui nous en séparent. Aussi, pour celles qui fuient encore, ce n’est pas dans l’état ou l’éclat où nous les voyons aujourd’hui. À l’heure qu’il est, certaines sont peut-être mortes ? L’objet quasiment stellaire (quasar) le plus connu s’éloigne à la vitesse de 270 000 km/s. Si, à ce train-là, un accident se produit maintenant, nous ne le saurions que dans 18 milliards d’années-lumière. Ce sera trop tard ! Les P & T ne vont pas vite dans l’espace-temps de la relativité.
Telles sont, à gros traits, les théories logiques et sidérantes des astrophysiciens rompus à toutes les audaces conceptuelles… sauf pour ce qui concerne les effets des planètes sur la Terre. Pluton, à 4 heures et demie de lumière serait… trop loin ! Notre voisine stellaire la plus proche, Proxima du Centaure, faiblement lumineuse, est à 4,3 années-lumière. C’est bien le temps qu’il faut pour couvrir 40 000 milliards de km à la vitesse arrondie de 300 000 km/s.
Oublions les yeux perçants de la raison pure pour ceux, un peu troubles, de nos sens. On estime que le système stellaire dont le Soleil fait partie se compose d’une centaine de milliards d’étoiles. Dans le ciel des deux hémisphères réunis, il n’y a, pourtant, que 6 000 étoiles visibles à l’œil nu. Si bien que : “Le nombre des étoiles visibles dans le ciel à un moment donne ne dépasse guère deux mille…” Un nombre qu’il faudra réduire à quelques-unes, deux fois rien, pour former l’anneau des constellations d’écliptique.
L’écliptique, voie du Soleil parmi les étoiles — littéralement la voie où se produisent les éclipses —, élimine une énorme population des repères stellaires dont on tire sa douzaine de figures abstraites. Sur ce qu’il reste d’étoiles, dans la voie solaire, la notion de brillance opère une autre sélection réductive.
Deux grands astronomes de l’Antiquité, Hipparque et Ptolémée, ont classé les étoiles d’après leur éclat en les divisant en six groupes ou grandeurs. Pour ces observateurs, témoins du ciel à l’œil nu, “les groupes étaient repartis de façon à ce que la différence de brillance entre les membres de deux groupes voisins soit toujours la même”. En se fiant à leurs facultés perceptives, au pouvoir discriminateur de l’œil, ils ne savaient pas que leur règle était celle d’une loi physiologique, la loi de Fechner. Au regard des définitions modernes, les étoiles de 1re grandeur doivent être cent fois plus brillantes que celles de 6e grandeur. Il en résulte que celles de 2e grandeur sont à peu près 2 fois et demie (2,512 fois exactement) moins brillantes que les premiers, et ainsi de suite, en suivant le même coefficient d’une grandeur à celle qui lui succède.
C’est donc sur un échantillon restreint d’étoiles hiérarchisées en 6 couches de brillance apparente que les premiers astronomes-astrologues ont repéré la voie du Soleil. Question : si les étoiles, dans leur vision de l’astrologie, devaient l’emporter sur le Soleil, pourquoi auraient-ils privilégié seulement une partie (22,5 %) de la sphère céleste et des constellations (moins de 8 %) ? Autre : la distribution naturelle des repères stellaires justifie-t-elle les arrangements que l’on connaît, et les formes obtenues sont-elles toutes en rapport avec les noms qu’elles portent ?
Dans un “débat” à sens unique sur la science et l’astrologie, La Recherche n’a pas répondu à la première question. L’auteur du “débat” seul à seul ne se l’est d’ailleurs pas posée. Pour la deuxième, l’article s’illustre d’une illustration qui montre, en effet, l’arbitraire des alignements ainsi que l’étrange fantaisie des dénominations si elles concernent bien les constellations et non pas autre chose : des Signes, par exemple…
Comme l’anticléricalisme de nos vétérans, l’anti-astrologie ne parait pas fortifier la rigueur intellectuelle. Il n’est nullement besoin de remonter à des astrologues sumériens pour trouver des auteurs imaginatifs parmi les astronomes : “Dans la liste (des constellations) composée vers la fin du XVIIe siècle par Hevelius, éminent astronome de Dantzig, on trouve plusieurs constellations récentes pour l’époque : la Girafe, la Mouche, la Licorne, la Colombe, les Chiens de Chasse, le Renard, le Lézard, le Sextant, le Petit Lion, le Lynx, l’Écu.” “L’astronome français Lacaille, explorateur du ciel austral, compléta cette liste, en 1752, par 14 autres constellations : le Sculpteur, le Fourneau, l’Horloge, le Réticule, le Burin, le Peintre, l’Autel, la Boussole, la Machine Pneumatique, l’Octant, le Compas, le Télescope, le Microscope, la Table, toutes constellations de l’hémisphère Sud.”
Lacaille porte un nom prédestiné aux constellations. Néanmoins, nous sommes tous consternés… Quatre mille ans après la mentalité magique d’une peuplade de l’Euphrate, il s’est trouvé des êtres évolués pour grouper des étoiles arbitrairement et leur donner des noms sans rapport avec leur forme, car il va sans dire que vous ne verrez dans le ciel austral pas plus de table, de mouche, de télescope, de peintre, que l’on ne voit de Verseau et de Chèvre dans notre hémisphère, sinon — comme le dit La Recherche — au prix de cette imagination qui paraît lui manquer pour défendre les astronomes. Normalement, un scientifique objectif et pas imaginatif (il y en a) aurait du voir des lettres et des chiffres. Pourquoi ce Sculpteur et ce Four ? Un autre astronome, français mais cela n’a pas d’importance en science, montre pourquoi : “En 1799, l’astronome français Lalande porta au ciel le Chat. Pour expliquer cette innovation, il dit dans l’un de ses ouvrages : ‘J’aime les chats, je les adore. J’espère qu’après ces soixante années de travaux incessants on me pardonnera de porter l’un d’eux au ciel’.”
De ce témoignage de non-primitif aux circonstances atténuantes, nous déduirons l’alternative suivante : ou bien ce sont les images de la Terre que l’on porte au ciel (Chat, Sextant, Chèvre…) ou bien ce sont les images du ciel qui se reproduisent sur Terre.
Étant donné que les derniers astronomes auteurs des dénominations australes ont manifestement nommé les objets célestes à partir d’objets terrestres, si les astrologues d’il y a cinq mille ans procédaient différemment, il devient capital de savoir, du point de vue de la mutation des espèces, à quelle époque des observateurs du ciel ont cessé d’être assez stupides pour ne pas distinguer un petit groupe d’étoiles d’un quelconque quadrupède existant ou fabuleux. Sous quelles pressions économique, politique, génétique, ce grand moment de conscience a-t-il pu se produire… s’il s’est jamais produit.
Les constellations sont capricieuses en étendue, nombre, forme, éclat… Leurs noms varient selon les pays, les latitudes, les époques. Certaines ont connu de curieux avatars. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, des astronomes européens “ont tente de supprimer des constellations anciennes pour en créer de nouvelles”. Le célèbre Halley, fort connu pour sa comète, en bon sujet de Sa Majesté le roi d’Angleterre, a donné à l’étoile principale de la constellation des “Chiens de chasse” le nom de “Cœur de Charles”. Des notabilités de l’Église s’en sont mêlées. Aux fins d’évangélisation d’un ciel aux dieux multiples, il fut proposé de changer le Bélier en Apôtre Pierre et de donner au Soleil le nom de Jésus-Christ, à la Lune celui de Sainte Vierge, à Vénus celui de Jean-Baptiste, sans omettre aucune planète. Comme le rapporte F. Ziguel, il est des phénomènes célestes qui auraient donné lieu à des descriptions blasphématoires.
Le célèbre astronome allemand Bode a placé aux nues les décorations du roi de Prusse, Frédéric II. Le Congrès astronomique de 1922 les a rejetées avec le Chat de Lalande. Depuis, de façon purement officielle, la sphère changeante des “fixes” compte 88 constellations aux limites bien définies mais d’un découpage forcement arbitraire… quoique scientifique.
La figure 24 concerne les assemblages de haute antiquité désormais consacrés “constellations zodiacales”. En dehors du Scorpion dont la forme vaut le nom, le reste n’est pas évident. Vous pouvez toujours demander à vos enfants ce qu’ils y voient, ce peut être un jeu, un test récréatif. À noter que s’il est des astronomes pour se demander comment les Anciens pouvaient voir un Bélier dans une figure aussi abstraite, Camille Flammarion a parfaitement distingué une corne. Pourquoi pas ?
Les configurations d’écliptique, sans être toutes remarquables, ont une tenue picturale digne d’une exposition de non-figuratifs. Au plan de leur influence supposée elles forment une suite hétérogène, irrégulière en nombre d’étoiles, en étendue (certaines se chevauchent), en intensité. Il y a, sous ce critère, des constellations insignifiantes (Bélier, Cancer), dépourvues de grandeur astrophysique, d’autres sont riches en amas, nébuleuses, galaxies (Vierge, Sagittaire). Une recherche statistique conduite par une équipe compétente devrait faire ressortir les inégalités d’un champ d’influence à ce point contrasté. Et même avec de non-compétents, le relief d’une constellation à l’autre donne aux résultats l’occasion de refléter ses inégalités. Or, il n’en est rien… Il n’y a aucun rapport, en effet, entre les abîmes et les pics d’un zodiaque stellaire, la distribution des pointes et des creux, et la distribution des caractères psychologiques tout au long de douze Signes qui ne signalent nulle anomalie, ni gouffre ni Annapurna. Pourtant, on ne peut rêver de plus dures et pures différences.
Telles sont les pièces du dossier de l’astrologie stellaire : inconsistantes, arbitraires, subjectives, de trois siècles avant Jésus-Christ à deux siècles après. Pour ses adversaires, il n’y a pas d’autre astrologie concevable et sa défense devient impossible, absurde… d’où l’intérêt de la réduire aux étoiles et leurs désignations mythiques. Mais, en contrepartie, c’est prendre le berceau des sciences et ses enfants, les Chaldéens, pour une pouponnière de débiles, un avis que ne partagent pas tous leurs héritiers, scientifiques ou littéraires, de ce siècle. L’anti-astrologie, il est vrai, fait dire n’importe quoi.
Le dossier des constellations ne plaide pas davantage pour les astrologues qui, sensibles aux critiques des astronomes, ont adopté le zodiaque stellaire (avec des origines variant d’un auteur à l’autre). L’argument le moins déraisonnable pour soutenir pareil défi à la rigueur, l’expérience et l’histoire, peut être qu’une intelligence divine aux déterminations prévoyantes a placé les étoiles comme il faut, où il faut, afin que les êtres de son choix, à la bonne époque, leur donnent les noms qu’il faut, accordés à leurs formes et propriétés physico-symboliques.
Voyons si le dossier des Signes nous épargne de mettre le divin en coopération.
Une spécialisation poussée nuit à la communication quand elle n’exclut pas tout simplement l’ouverture d’esprit. Les astromètres partisans des étoiles et de la précession comme de bons moyens de réfuter les Signes n’ont pu jeter qu’un œil distrait sur les publications de leurs confrères historiens. Dans La Science des Chaldéens, Marguerite Rutten (conservateur adjoint honoraire des Musées nationaux), en citant Diodore de Sicile, rappelle quelles étaient les théories astrologiques des Chaldéens sur le zodiaque : “Parmi les dieux conseillers il y a douze chefs dont chacun préside à un mois de l’année et à un des douze Signes du zodiaque. Le Soleil, les planètes et la Lune passent par ces Signes.”
Sur les étoiles : “En dehors du cercle zodiacal, ils déterminent la position de 24 étoiles, dont une moitié est au nord et l’autre au sud ; ils les appellent ‘juges de l’Univers’ : les étoiles visibles sont affectées aux êtres vivants, les étoiles invisibles aux morts”. Et à nouveau le zodiaque selon Marguerite Rutten : “Les Babyloniens ayant reconnu très anciennement que les planètes, le Soleil et la Lune, suivent un parcours qui est sensiblement dans la même région céleste, ont réalisé le ’zodiaque’, ou plan de l’écliptique qu’ils ont divisé en 12 ’bèrou’ (secteurs de 30°). Ils avaient du, pour déterminer la trajectoire du Soleil, établir des points, pris parmi les étoiles les plus brillantes, qui formèrent les 12 signes du zodiaque.”
À moins de contester les traductions, les traducteurs, le sens mathématique des Babyloniens, leur esprit d’observation, et de ne retenir que leurs pratiques magiques, il est assez clair que, sans connaître le phénomène de précession, ils ne prenaient pas les mois pour des Signes, les Signes pour des étoiles et que celles-ci leur ont surtout servi de repères pour tracer le chemin du Soleil. Par ailleurs, en raison même de leur sens religieux comme de leur attachement à la magie des noms, il est impensable que les Sumériens aient pu designer n’importe quoi par n’importe quoi. En ce temps-là, avant de voir une table ou un chat dans le ciel comme les astronomes du XVIIIe siècle, il fallait s’y prendre à plusieurs et à plusieurs fois. Seuls des technocrates du XXe siècle peuvent se permettre de marginaliser dans une ethnie homogène leurs fantasmes anti-astrologiques. Leurs procédés de chirurgiens pathologiques s’étendent d’ailleurs au cerveau des créateurs et penseurs qui ont eu quelque faiblesse pour l’astrologie.
Les Babyloniens distinguaient parfaitement le jour et la nuit… bien qu’ils prissent des étoiles pour une chèvre. Les constellations viennent des observations faites la nuit, conformément à la vision humaine… ou bien avant que le Soleil se lève, ou après son coucher, ce qui permet de le situer dans son décor par les étoiles qui lui succèdent et le précèdent. De jour, son éclat, la diffusion de sa lumière dans notre atmosphère, cachent l’arrière-plan. Il n’y a plus que lui. En contrepartie des constellations qui se montrent la nuit, les Signes concernent ce qui se montre le jour : les hommes, les activités sociales, les saisons, les mois, les bêtes, choses et gens, le Soleil en personne. Bref, la marche humaine, sociale, cosmique du temps et de ses rythmes.
Alors qu’il est difficile de discerner une écrevisse (autre nom ou nom d’origine du Cancer) dans la disposition d’étoiles peu originale, au solstice d’été (21–22 juin) n’importe quel incrédule de notre hémisphère constatera que le jour, ayant cesse de croître, reculera dans sa durée comme une écrevisse recule dans son espace. Un autre incrédule qui perdrait la raison à chercher une balance dans la constellation de ce nom pourra admettre que le symbole de l’équilibre convient, non pas aux étoiles de cette région, mais au mois de l’année où la durée du jour et de la nuit s’égalisent. Dans son Tetrabible, Claude Ptolémée qui avait compilé Hipparque, le découvreur de la précession, explique les dénominations des Signes par les phénomènes solaires (année tropique) et non par les arrangements stellaires. Le texte suivant du IIe siècle après J.-C. montre sans contestation possible que les astrologues post-chaldéens, même en usant des étoiles fixes, reliaient le zodiaque aux phases saisonnières :
“Il existe en effet deux Signes tropiques, d’une part le premier intervalle de trente degrés depuis le solstice d’été, soit le Signe du Cancer, de l’autre, le premier depuis le solstice d’hiver, soit le Capricorne. Ces Signes ont reçu leur nom de ce qui se passe en eux. En effet le Soleil, lorsqu’il est entré dans ces Signes, recule en arrière, tournant son cours en une latitude contraire, causant l’été dans le Cancer, et dans le Capricorne, l’hiver.” “II y a encore deux Signes équinoxiaux, le Bélier printanier et l’automnale Balance, qui eux aussi ont pris leur nom de ce qui se passe en eux, car quand le Soleil est au début de ces Signes, les espaces du jour et de la nuit sont égaux pour toute la Terre.”
Plus près de nous dans le temps, au XVIIIe siècle, un astronome peu soupçonnable de sentiments pro-astrologiques, François Arago, exprime dans son Astronomie populaire sa compréhension des différences : “Il faut donc avoir soin, pour éviter toute confusion, de bien distinguer le mot constellation du mot Signe. Les constellations sont des figures d’hommes ou d’animaux, dessinées dans le zodiaque, et n’ayant, comme nous l’avons déjà dit, aucun rapport avec la disposition des étoiles qu’elles renferment. Les Signes sont des divisions de 30 degrés chacune, sans aucune liaison nécessaire avec les constellations dont ils portent les noms. En vertu de la précession des équinoxes les signes ne coïncident déjà plus avec les constellations.”
Ptolémée reconnaît la différence en attribuant aux Signes une nature qu’ils tiennent du Soleil au mois le mois. Arago affirme la différence en réduisant les Signes à une division géométrique. Sur cette fin de siècle, les astronomes déclarent, sur leur foi de charbonnier, qu’il n’y a jamais eu de Signes… Où est passée la différence ?
Ancien ou moderne, astrologue ou astronome, est-il vraiment possible de nier la source solaire des symboles zodiacaux ? Oui, si, l’esprit de contradiction aidant, on demande à tous les Signes d’être aussi explicites que la Balance et l’Écrevisse. Or, ce sont des symboles et, par définition, les symboles n’expriment pas directement ce qu’ils désignent, outre le fait qu’ils peuvent désigner plusieurs choses aux fonctions ou structures comparables. Le Poisson-Chèvre se comprend mieux par le solstice d’hiver que par un maigre éparpillement d’étoiles, mais il faut faire appel à l’analogie. Alors, dans notre hémisphère, ce monstre n’est qu’un Soleil à l’entrée de l’hiver : poisson de l’arrière parce qu’il a touche le fond de sa descente sous le plan de l’équateur céleste, chèvre au-devant parce qu’il va reconquérir les hauteurs perdues. La logique de cette interprétation n’en exclut pas d’autres. Dans son Uranographie, L.-B. Francœur rapporte ainsi le système explicatif de Pluche. Certains de ses éléments (le Lion aux chaleurs, la Vierge aux moissons…) ont toujours crédit dans l’astro-psychologie contemporaine linéairement symboliste :
“Suivant Pluche, le Bélier et le Taureau commençaient le printemps dans l’origine ; et, à cette époque, les brebis et les vaches mettent bas. Le mois suivant, les chèvres en font autant, et les Gémeaux étaient aussi représentés par deux chèvres, ou par deux amants, symbole de fécondité. Le Cancer annonce le solstice d’été par la rétrogradation vers les signes descendants. Le Lion répond aux chaleurs et la Vierge aux moissons, dont son épi est le symbole. La Balance désigne l’égalité des jours et des nuits à l’équinoxe d’automne ; le Scorpion, les maladies fréquentes dans cette saison ; le Sagittaire, les plaisirs de la chasse communs en novembre. Le Capricorne annonce que le Soleil remonte vers les Signes supérieurs. Le Verseau est le temps des pluies et les Poissons celui de la pèche.”
En évoquant la précession et en prêtant, à tort, l’invention du zodiaque aux Égyptiens, Francœur récuse Pluche pour lui préférer l’explication de Charles-François Dupuis, fondée sur les incidences diverses des fluctuations du Nil. Pour Francœur, qui n’était pas n’importe qui (professeur à la faculté des sciences de Paris), l’origine saisonnière des noms de Signes ne fait pas de doute, et elle est égyptienne, c’est clair comme les eaux du Nil : “Le zodiaque est une invention égyptienne ; il représente trop fidèlement la suite des phénomènes annuels propres au climat d’Égypte pour qu’il ne reste le moindre doute à cet égard : le hasard n’enfante pas de ces réunions prodigieuses de faits qui tous conspirent vers un même but. Les douze principaux actes de la nature ont reçu pour emblèmes les douze signes célestes que parcourt le soleil annuellement. Voila ce qu’il est impossible de nier.”
Le service de documentation de La Recherche devrait décidément se procurer quelques ouvrages supplémentaires à l’intention des auteurs inquiets de l’excès d’imagination des Chaldéens. Jean-Claude Pecker aurait pu y apprendre qu’un éminent confrère d’un siècle récent referait, de façon indéniable, les Signes au parcours annuel du Soleil en reliant les actes de la nature aux emblèmes stellaires. Il en résulte, selon Dupuis, un curieux décodage du monstrueux Poisson-Chèvre : “Dupuis admet que, dans les temps reculés, le Soleil était dans la constellation du Capricorne à l’époque du solstice d’été ; l’astre atteignant alors sa limite la plus élevée, était comparé aux chèvres qui se plaisent sur les hauteurs. Le Capricorne est en effet représenté dans l’attitude du repos qui convient au solstice ; sa queue de Poissons se rapporte à l’inondation qui va bientôt commencer (vers le milieu de juillet).”
Un scientifique, de la même académie que Pecker, admet tête baissée l’explication d’un autre membre de sa corporation qui, pour justifier sa thèse, décale les signes de 180° afin que les Égyptiens accordent leurs activités journalières aux emblèmes qu’ils voient la nuit. Qui rêve en ce bas monde ? Pas J.-C. Pecker puisqu’il lui suffit de se pardonner les errements au nom des “révolutions scientifiques” qui “considèrent les théories abandonnées comme de nécessaires étapes, comme des réflexions de première approximation… Cette véritable activité scientifique, avec ses remords, ses retours, ses retouches, et quand même sa cohérence efficace, recèle trop de splendeurs pour que l’on doive avoir besoin des ersatz philosophiquement contradictoires de la magie et de l’astrologie…” Car, sachons-le, la science à retouches n’est pas contradictoire et : “…le monde est beau, tel qu’il est. Il suffit de le regarder et de chercher à le comprendre, sans rêves stériles et sans peurs irrationnelles, et de s’émerveiller…” Comme Francœur.
Après Ptolémée, Pluche, Dupuis, Francœur, Arago, tous recalés au baccalauréat du “Touche pas à mes retouches” ou “Avant moi le déluge”, une tentative moderne d’explication des dénominations des Signes mérite d’être signalée, celle de René Alleau qui figure à l’article “Astrologie” de l’Encyclopedia Universalis. En premier lieu, sur les origines du zodiaque, René Alleau conteste les sources de l’historien Diodore de Sicile. Les Chaldéens qu’il évoque, dit-il, sont “déjà mythiques, et les charlatans qui les remplacent portent seulement leur nom”. On ne sait ce qu’en pense Marguerite Rutten… Ensuite, à l’aide des inventaires d’astérismes célestes, il reconstitue “la première structure zodiacale connue” avec les clefs — prises dans les astérismes — de sa “véritable signification historique”. Il est évidemment impossible, dans ce tour d’horizon des thèses et antithèses, de reproduire tout le texte de René Alleau. On y apprend des choses inédites, fort intéressantes ou les dénominations stellaires restent liées à des objets terrestres.
Toujours selon cet auteur, le zodiaque babylonien ne peut pas remonter à plus de 2 160 ans avant l’ère chrétienne, sinon il faudrait faire un tour complet de précession et reculer jusqu’à 25 920 ans avant J.-C. Enfin, pour René Alleau, “la concordance de la première date avec l’évolution des techniques divinatoires pratiquées sur les animaux à l’époque de la première dynastie de Babylone permet de comprendre que… la topologie zodiacale a été déduite d’une topologie anatomique divinatoire, projetée sur des ’animaux célestes’, et non pas de l’observation astronomique.”
Tout en admirant la recherche originale de René Alleau, nous avouons ne pas très bien comprendre qui sont ces “animaux célestes”. Le plus clair de sa pensée que nous traduisons ici librement parait être que les Babyloniens rompus à lire la volonté des dieux par l’examen des entrailles animales (haruspices) ont regardé le ciel des étoiles comme composé d’animaux symboliques. En ce cas, il s’agit encore de porter aux nues ce que l’on porte au cœur, dans ses mœurs, habitudes et préoccupations, en l’occurrence divinatoires.
Apparemment quelque peu insatisfait — il y a de quoi — par “le caractère artificiel et conventionnel de la topologie zodiacale babylonienne”, donc de cette réduction du ciel à des pratiques divinatoires contingentes, René Alleau trouve finalement que le zodiaque et sa division en douze parts relevant des archétypes du cercle et des nombres. Au fond, il n’est plus besoin d’interroger l’histoire. Il y a des structures éternelles qui s’expriment différemment par le prisme des époques et des ethnies… et le cercle reste un cercle au-dessus du monde des hommes, loin de leurs impérities mais omniprésent dans l’inconscient collectif. Ce qui fait dire à R. Alleau : “Plus durable que la tour de Babel, le zodiaque a résisté à tous les accidents de l’Histoire. Il le doit moins à ses merveilleuses images qu’à la secrète vérité qu’elles dissimulent et que Pythagore, seul, semble avoir découverte et prudemment cachée : celles des structures harmoniques de l’espace et du temps révélées par la géométrie du cercle. Tel est aussi le grand principe scientifique qu’exploite inconsciemment la divination astrologique…”
Tout en achevant sa quête sur une apothéose métaphysique (la structure du cercle), Alleau ne commet pas moins la maladresse de prendre, comme la majorité des scientifiques contemporains, les Babyloniens pour des esprits relativement un peu plus arriérés que ceux de notre époque… puisqu’ils sont en arrière dans notre comptabilité des ans. Or, ne serait-on pas plus près de l’inconscient collectif et, par conséquent, des structures, en étant moins raisonneurs qu’au XXe siècle ? En somme, des anthropoïdes incultes (ou en voie de culture) doivent théoriquement communiquer avec l’inconscient universel mieux que des homo sapiens imbus de néo-rationalité. Le plus ancien des zodiaques serait le plus pur, le plus proche de l’authenticité, un peu comme il convenait, autrefois, de juger du sauvage “près de la nature” malgré son incivilité.
Laissons là, momentanément, ces débats. Il ressort du dossier des Signes que leur symbolisme se prête à de multiples lectures. Mais il apparaît que toutes les exégèses sur leurs dénominations ne livrent une logique (interne ou historique) qu’en prenant leurs sources dans l’année tropique organisatrice des activités humaines à tous les niveaux concevables. Pour rendre le zodiaque ridicule, il faut d’une part déprécier ces activités lorsqu’elles remontent aux millénaires révolus, croire ou feindre de croire que les Sumériens — quelque part nos ancêtres — voyaient des graffitis dans les étoiles.
Texte extrait de L’Astrologie universelle, éd. Albin-Michel 1986.
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