La nature des effets astrologiques est avant tout conjecturale, stochastique et chaotique. Il n’existe par conséquent pas de déterminisme astrologique mécanique dont une étude statistique pourrait montrer, et non démontrer, la probabilité ou l’improbabilité. Ce fait n’a pas empêché partisans et adversaires de l’astrologie de s’y livrer pour le meilleur (rarement) et le pire (presque toujours). Pourtant, des études statistiques sérieusement conduites pourraient mettre en relief et détecter quelques-uns des effets astrologiques les plus saillants et donc les plus visibles. Mais celles-ci n’ont encore jamais été réalisées, bien que tous les éléments soient réunis pour qu’elles puissent être faites. Pour des chercheurs audacieux, un vaste territoire inconnu reste donc à explorer, sachant qu’il se limiterait à la partie émergée de l’iceberg astrologique, dont environ 90 %, en filant cette glaciale métaphore, resteraient donc hors de portée de toute statistique…
“Les statistiques, faites par des pro- ou des anti-astrologues, sont consacrées à la vérification d’affirmations traditionnelles ou modernes. La matière est vaste, illimitée, et l’outil n’est pas toujours à la hauteur du problème. Si, de surcroît, l’utilisateur est novice ou mal intentionné - un rien d’a priorisme suffit - les résultats s’en ressentent immédiatement” (Jean-Pierre Nicola, astrologue-chercheur).
“De quelle manière la configuration du ciel au moment de la naissance détermine-t-elle le caractère ? Elle agit sur l’homme pendant sa vie comme les ficelles qu’un paysan noue au hasard autour des courges de son champ : les nœuds ne font pas pousser la courge, mais ils déterminent sa forme. De même le ciel : il ne donne pas à l’homme ses habitudes, son histoire, son bonheur, ses enfants, sa richesse, sa femme… mais il façonne sa condition” (Johannes Kepler, astrologue-astronome).
“Le gratifiant, c’est d’avoir une hypothèse de travail, de la contrôler expérimentalement, et qu’elle soit vraie” (Henri Laborit, chirurgien et neurobiologiste, qui s’est honteusement compromis avec Élizabeth Teissier pour d’inavouables raisons médiatiques sans pourtant être dupe, et sans être pro-astrologie pour autant… ni systématiquement contre non plus.
Voici ce qu’écrivait Michel Gauquelin dans son premier livre à propos de ses astro-statistiques : “Ces résultats représentent une enquête considérable dans le but de vérifier les règles astrologiques sur des groupes très étendus et très variés. Il faut bien se pénétrer de l’idée que ces résultats représentent une véritable démolition de l’astrologie […], car elle n’attaque pas un auteur quelconque, mais les bases les plus élémentaires de cette doctrine elle-même” (c’est lui qui souligne). Même si elle n’est pas dénuée d’un réel mais partiel fondement, il convient tout d’abord de mettre un sérieux bémol à cette affirmation péremptoire.
Il est absolument exact que les résultats de ses astro-statistiques ruinent la majeure partie des assertions contenues dans l’immense majorité des manuels d’astrologie classique ou “traditionnelle”, et en cela Gauquelin a raison. Mais il a tort quand il considère, sans le démontrer, que ces sources de données exposeraient les “bases les plus élémentaires de cette doctrine elle-même”. Ces ouvrages ont en effet en commun de ne proposer en réalité que des théories descriptives du fait astrologique qui s’originent partiellement dans la Tétrabible de Ptolémée datant du IIe siècle, ont été réélaborées entre les XVe et XVIIe siècles et n’ont pratiquement pas varié depuis. Ceci constitue une réalité historique et épistémologique incontestable.
Gauquelin n’a donc pas à travers ses statistiques ruiné les bases élémentaires du savoir astrologique en soi, lequel remonte à des millénaires avant la parution de la Tétrabible. Ce qu’il a effectivement invalidé, ce sont les assertions dogmatiques ou doctrinaires qui fondent la conception de l’astrologie dite “traditionnelle”, ce qui est très différent. À titre de comparaison, quel crédit pourrait-on accorder à un chercheur qui prétendrait invalider les théories et pratiques de la médecine moderne en ne se fondant que sur la critique des conceptions médicales d’Hippocrate ou de Galien ? Aucun. Or c’est précisément ce que Gauquelin a fait.
Cette importante précision ayant été faite, on pourrait immédiatement exposer quelles sont les assertions théorico-dogmatiques dites “traditionnelles” que Gauquelin a effectivement “démolies”, et lesquelles ont résisté aux assauts de son bulldozer statistique.
Mais ce serait faire l’impasse sur ce qu’il n’a pas testé, et qui est pourtant les deux incontestables piliers de l’astrologie “traditionnelle”, à savoir la doctrine des 4 Éléments et celle des Maîtrises planétaires qui lui est adossée. La première, tirée et adaptée de la vision du monde aristotélicienne, constitue le fondement théorique principal du savoir et la référence obligée de tous les écrits astrologiques depuis le XVIe siècle. La seconde, plus spécifiquement astrologique, prétend que chaque planète est associée à un ou deux Signes dont elle tire force ou faiblesse. Ces deux doctrines déterminent en majeure partie les influences et significations attribuées aux Signes comme aux planètes.
Pourquoi Gauquelin n’a-t-il pas commencé par tester ces doctrines ? Parce qu’il avait une vision naïve de la science, proche d’une irrationnelle croyance empiriste, qui lui faisait préférer ce qu’il considérait comme des “faits” aux théories, comme si lesdits “faits” n’étaient pas des réalités produites par des théories antérieures. Et en l’occurrence, les “faits” astrologiques qu’il entendait tester n’en n’étaient pas : ce n’étaient que des éléments d’un puzzle qu’il se refusait à considérer comme un ensemble organisé.
Cette aversion irraisonnable mais très compréhensible de Gauquelin pour les théories étant développée plus loin, inutile de s’y attarder, sinon pour signaler qu’elle l’a empêché de théoriser ses propres résultats, c’est-à-dire de les comprendre. On se contentera ici d’observer que s’il avait testé statistiquement la validité des doctrines des 4 Éléments et des Maîtrises planétaires sur les Signes, il aurait pu saper à la base les deux piliers théoriques de l’astrologie “traditionnelle”. Et de ces deux doctrines, l’une fondée sur la conception aristotélicienne du monde physique dont la fausseté a été constatée et démontrée, et l’autre sur un délire d’influence caractérisé, il ne fait pas de doute qu’une étude statistique aurait montré l’insignifiance. Et peut-être même cette démolition en règle de ces théories aurait-elle permis de voir émerger des “faits” statistiques imprévus et signifiants. Mais son quasi-infantile anti-théoricisme a fait passer Gauquelin à côté d’une implacable démonstration et de l’éventuelle découverte de nouveaux “faits”. Il aurait fait alors fait une œuvre utile qui aurait de plus significativement contribué au genre d’astro-gloire qu’il recherchait.
Cet anti-théoricisme a aussi été pour Michel Gauquelin un prétexte fallacieux mais commode pour lui éviter de tester d’autres hypothèses. Des hypothèses fondées sur des théories astrologiques contemporaines, elles aussi productrices de “faits”, dont il craignait que la mise en signifiance statistique ne fasse de l’ombre à son statut auto-proclamé de “cosmopsychologue” puis de “néo-astrologue”.
Le tableau récapitulatif ci-dessus montre par ailleurs que ces astro-statistiques n’ont pas systématiquement “démoli” toutes les bases de l’astrologie traditionnelle. La démolition est certes impressionnante mais pas totale, contrairement à ce qu’affirme Michel Gauquelin. Sur ce champ de ruines subsistent quand même 5 Planètes sur 10, les axes horizontal et méridien en tant que facteurs de valorisation Planétaire, la préséance du diurne sur le nocturne et le puzzle de “traits de caractère” attribués aux Planètes retenues par le tamis statistique. Du passé-passif astrologique il n’a donc pas fait table rase comme il le claironnait en 1955. C’est peut-être en ayant fini par en convenir qu’il déclara ceci en 1983 : “Mais aujourd’hui, je ne me permettrais pas de tirer des conclusions radicales, comme j’ai parfois fait par le passé. Je me contenterais d’être simplement satisfait d’avoir éclairé un peu ce vaste mystère qui a occupé tant de grands esprits au cours des siècles.”
Pour l’astrologie traditionnelle, il n’y a néanmoins pas de quoi pavoiser. Suitbert Ertel le récapitule ainsi : “Le lien entre Gauquelin et l’astrologie est généralement surestimé. Gauquelin a démoli la plupart des prétentions astrologiques, et le lien restant entre l’astrologie et les relations planétaires est faible. […] Les tailles d’effet sont bien trop petites pour être utiles, de sorte que la propagande des astrologues (selon laquelle les résultats de Gauquelin soutiendrait leurs idées) est trompeuse. Les sceptiques informés verront à juste titre les relations planétaires comme un hoquet intéressant, mais avec potentiel insuffisant pour justifier des recherches ultérieures. Néanmoins, les futurs historiens de la science pourront être reconnaissants pour cet exemple d’interaction active entre une anomalie apparemment inamovible et l’inarrêtable force de la science.”
Ceux des astrologues qui se rattachent au courant “traditionnel” ont accueilli de diverses manières ces résultats catastrophiques pour leurs croyances. La plupart n’en ont d’ailleurs eu qu’une connaissance très superficielle qu’ils n’ont généralement pas cherché à approfondir. Les moins bien informés et/ou les plus hallucinés ont pris les astro-statistiques Gauquelin pour une confirmation scientifique de leurs croyances. Il faut le faire… Le tableau ci-dessous vous donne un récapitulatif sommaire de la diversité de ces réactions. Remarquez que l’astrologie non-traditionnelle, c’est-à-dire contemporaine, conditionaliste et naturelle, n’est en rien remise en question ni même directement concernée par les résultats de ces statistiques qui n’ont testé ni ses théories ni ses pratiques.
Néant. Quelque soit l’échantillon professionnel testé, aucun écart significatif à la moyenne théorique n’a pu être constaté, que ce soit pour les Signes solaires, Ascendants ou au Milieu-du-Ciel, et ce sont les seules hypothèses qui ont été testées. Les Gauquelin ont aussi testé les Signes en se basant sur les assertions les plus absolues les concernant, qu’ils ont évidemment glanées exclusivement dans la littérature astro-symboliste. Ils ont donc entre autres pris comme source de données un listing de généraux de l’Empire napoléonien pour vérifier si par hasard il n’y aurait pas une sur-fréquence des naissances sous le Signe du Bélier, étant donné que ce Signe passe pour être agressif, donc favorable aux carrières militaires, surtout chez les hauts gradés et à ce titre “connus”. Les correctifs démographiques ayant été faits, les Gauquelin se sont aperçu que les généraux d’Empire - et les autres aussi - n’étaient ni plus ni moins Bélier que la moyenne.
Émile Zola, avec un amas de planètes en Bélier et pour autant pas du tout général, constitue un excellent et suffisant contre-exemple, qui écrivait dans J’accuse : “On nous parle de l’honneur de l’armée, on veut que nous l’aimions, la respections. Ah ! certes, oui, l’armée qui se lèverait à la première menace, qui défendrait la terre française, elle est tout le peuple, et nous n’avons pour elle que tendresse et respect. Mais il ne s’agit pas d’elle, dont nous voulons justement la dignité, dans notre besoin de justice. Il s’agit du sabre, le maître qu’on nous donnera demain peut-être. Et baiser dévotement la poignée du sabre, le dieu, non !” Il va sans dire que les Gauquelin ont testé les onze autres Signes avec la même méthode uniquement basée sur la profession, et que leurs statistiques ont donné des résultats entièrement négatifs pour le zodiaque, dont ils ont par conséquent décrété qu’il n’avait aucune influence… contrairement à celle de leurs méthodes sur leurs résultats en ce qui concerne les Signes.
Les Gauquelin ont eu l’idée de faire un autre test zodiacal : il s’est agi d’évaluer si les individus présentant des “traits de caractère” Bélier, lesquels étaient extraits des fréquences lexicales concernant l’agressivité dans leurs biographies, étaient effectivement nées plus fréquemment que d’autres sous ce Signe. Et bien, pas du tout : ils préféraient naître (entre autre) sous des fréquences du Cancer sensiblement supérieures à la moyenne théorique ! Les Gauquelin ont procédé de même avec les Ascendants Bélier. Rien. Idem pour les 11 autres Signes. Nulle part ils ne mentionnent s’ils ont étudié les cas d’individus présentant des amas de planètes en Bélier tout en étant nés sous un autre Signe solaire et Ascendant, ni même quelle était par exemple l’influence de Mars (Planète elle aussi affublée du “trait de caractère” “agressif”) dans les populations qui avaient des “traits de caractère” Bélier mais qui étaient nées avec un Soleil en Cancer. Voilà ce qui arrive quand on pratique de l’astro-statistique “à la découpe”. Françoise Gauquelin de son côté a eu, elle toute seule, l’idée saugrenue de tester la validité de la doctrine des Maîtrises planétaires, ce qui est complètement loufoque étant donné l’inanité de celle-ci. Bilan négatif. Elle en a conclu que celle-ci était fausse. Il suffisait pourtant d’un peu de réflexion pour le faire, sans l’aide d’aucune statistique.
La méthode et les hypothèses sur lesquels se sont fondés les Gauquelin montrent qu’ils n’ont strictement rien compris à la réalité du zodiaque. En effet, ils ont procédé comme si le zodiaque avait une réalité totalement indépendante de celle des Planètes. Or un Signe n’existe pas en soi : il n’est qu’une phase caractéristique des déclinaisons des Planètes sur ou à proximité de l’écliptique autour de l’équateur terrestre, ces déclinaisons induisant le cycle de variations de présence diurne ou d’absence nocturne par rapport au plan de l’horizon, dont les effets varient selon les latitudes géographiques. En d’autres termes, un Signe n’est qu’une fréquence géocentrique d’une planète et il se caractérise par sa déclinaison et son rapport des durées diurnes/nocturnes.
Cette définition précise de la réalité zodiacale signifie que les effets d’un Signe ne peuvent être appréhendés sans faire référence à la Planète dont ce Signe est une phase du parcours. On ne peut donc tester statistiquement les effets des Signes qu’en testant en même temps les effets des Planètes. Et pour ce faire, il faut d’abord tester les effets planétaires selon la méthode indiquée dans la section suivante. On peut ainsi dans un premier temps déterminer les effets hypothétiques d’un ensemble de Planètes situées dans les secteurs-clés “angulaires” sans prendre en compte les Signes concernés par les Thèmes natals de la cohorte statistique ainsi étudiée. Cela ayant été fait, on peut dans un deuxième temps intégrer les facteurs zodiacaux à cette étude, en comparant les résultats obtenus par deux cohortes différentes composées d’individus ayant les mêmes dominantes planétaires mais des dominantes zodiacales différentes. Cette comparaison permettrait de mettre en évidence ce qui revient en propre aux Signes. Toute autre méthode ne peut qu’être vouée à l’échec en raison de son inadéquation à l’objet à tester.
Il est probable que le seul critère de la réussite professionnelle dans quelque domaine que ce soit ne produira aucun résultat positif ou négatif. En associant Planètes et Signes, ce qui est la seule voie réaliste d’évaluer les effets des Signes, on entre dans une zone de subtilité auxquelles des statistiques classiques ne peuvent avoir accès. Seules des hypothèses fondées sur des tests de “traits de caractère” très logiques mais aussi extrêmement sophistiqués pourraient être susceptibles de confirmer ou infirmer les effets spécifiques des Signes par un traitement statistique approprié.
Comme le disait très justement Jean-Pierre Nicola, Michel Gauquelin “n’a pas testé des hypothèses du genre conditionaliste ou autre. Il s’est spécialisé dans le contrôle d’assertions absolues pour en montrer l’inanité.” En ce qui concerne le zodiaque, il a parfaitement réussi.
En résumé, il aurait été étonnant que les Gauquelin valident l’influence des Signes du zodiaque en se basant sur de telles hypothèses qui reprennent au pied de la lettre les assertions astro-symbolistes les plus catégoriques et les plus caricaturales en isolant à chaque fois un Signe particulier. Ils auraient obtenu de tous autres résultats s’ils avaient mené des études globales sur la prévalence, par exemple, des Signes d’excitation sur les Signes d’inhibition raccordée à telles ou telles dominantes planétaires. Mais pour y parvenir, il aurait fallu qu’ils envisagent le Thème natal comme un tout, bref qu’ils soient astrologues conditionalistes… ce qu’ils n’ont jamais été.
Les astro-statistiques gauqueliniennes n’ont permis de valider que l’influence de 5 Planètes (Lune, Vénus, Mars, Jupiter & Saturne) sur les 10 que prend en compte l’astrologie. Les anti-astrologues ont trouvé que c’était trop ; les astro-symbolistes, pas assez. De toute façon, c’étaient comme pour le zodiaque des statistiques “à la découpe” qui isolaient à chaque une fois une Planète pour étudier la fréquence de ses positions dans les secteurs de la sphère locale en rapport avec une profession ou avec la méthode des “traits de caractère”.
Or le cas d’une telle Planète isolée n’existe pas dans la réalité. Elle appartient toujours à un ensemble (celui des astres du système solaire considérés comme efficients par l’astrologie) ou à un sous-ensemble (par exemple celui des Planètes dites “angulaires” situées dans les “secteurs-clés” de leur lever, leur coucher, leur culmination supérieure et inférieure).
Admettons qu’une étude statistique ne porte que sur ce sous-ensemble des Planètes angulaires. Dans ce cas de figure, un fait astronomique est statistiquement incontestable : il est très peu fréquent qu’une seule Planète soit angulaire. Du fait de la moyenne astronomique de répartition planétaire, variable selon les jours, les mois, les années et les siècles, la probabilité est beaucoup plus grande que deux ou plusieurs Planètes se situent dans ces secteurs-clés. Dans cette perspective, ce qui doit faire l’objet de cette étude statistique, ce sont toutes les cartes du ciel natales comportant le même nombre de Planètes et les mêmes Planètes dans les mêmes secteurs-clés, et non une seule Planète prise isolément. Et si l’on décide de n’étudier que les fréquences d’une seule Planète dans un ou plusieurs secteurs-clés au sein d’une cohorte, il faut alors ne retenir que les cartes du ciel ne comportant qu’une seule Planète angulaire pour constituer les cohortes de base et de contrôle. Si ces conditions ne sont pas réunies et respectées, une telle étude statistique ne pourra comparer que des données objectivement incomparables.
On peut alors par exemple appliquer à ces cohortes le critère des “traits de caractère”, qui est beaucoup plus pertinent que celui des réussites professionnelles. L’étude statistique portera alors sur la vérification de la pertinence de la corrélation entre un “trait de caractère” défini et la position d’une Planète angulaire, si l’on pose comme hypothèse que ce “trait de caractère” ne peut être associé qu’à une seule Planète, ce qui reste à vérifier.
On admettra pour commencer que le fonctionnement d’aucun individu ne peut se réduire à un seul “trait de caractère”, fût-il le plus saillant et le plus fréquent dans la gamme plus ou moins variée de ses comportements observables. Il s’agit là d’un incontestable fait psychologique. Admettons néanmoins que certains individus se signalent par un “trait de caractère” si récurrent et dominant qu’il paraît éclipser toutes les autres composantes de son fonctionnement. Dans ce cas, l’objet d’une étude statistique sérieuse devra être de vérifier s’il existe ou non une corrélation significative entre l’unique Planète angulaire associée à ce “trait de caractère”, et ce “trait de caractère” observable lui-même.
Dans le cas des multi-angularités planétaires, qui sont la norme, la démarche devient nettement plus complexe, au moins aussi complexe que le réel astrologique, astronomique et/ou psychologique. Les “traits de caractère” propres à une seule Planète se multiplient. La vérification statistique devient hautement aléatoire sinon improbable. Et on comprend mieux pourquoi, selon les études des Gauquelin, un individu né au lever ou à la culmination supérieure de Mars n’a que 33 % de probabilité d’avoir un caractère “marsien” et 67 % de ne pas l’avoir. La raison en est simple : personne ne peut être “marsien” à 100 % ou même seulement à 67 %. Et si un individu relève d’un “trait de caractère marsien”, il relève aussi toujours et en même temps d’autres “traits de caractère” associés à d’autres Planètes exprimés simultanément ou successivement dans des situations différentes, selon des proportions variables chez chaque individu en fonction de son Thème natal et de son vécu de celui-ci compte tenu d’autres paramètres astrologiques et non-astrologiques.
Ce qui devrait donc être statistiquement étudié dans le sous-ensemble des angularités planétaires n’est pas un “trait de caractère” artificiellement isolé attribué à une Planète elle aussi artificiellement isolée, mais l’ensemble des “traits de caractère” pouvant être synthétiquement attribués à l’ensemble des Planètes angulaires similaires à l’intérieur d’une même cohorte d’individus que leurs Thèmes natals rendent représentatifs de cette configuration. Exemple : le trio Soleil-Mercure-Vénus peut être défini par un ensemble de “traits de caractère” associés qui lui est spécifique, et cet ensemble ne peut être confondu avec l’ensemble des “traits de caractère” associés qu’on peut attribuer au trio Mars-Jupiter-Saturne. Un traitement statistique adéquat de ces données permettrait de mettre en évidence cette différence. Cette opération est tout-à-fait réalisable et toutes sortes de combinaisons et comparaisons sont possibles.
On est là très loin de “l’effet Mars”, qui ne concerne rappelons-le que l’application du critère de la réussite professionnelle à des cohortes de champions sportifs très connus. Soulignons que chez ceux-ci, Mars n’est angulaire que dans 22 % des cas, ce qui signifie que 78 % de ces champions ne sont pas “marsiens”. La seule réalité statistique de “l’effet Mars”, c’est que selon les lois du hasard, seuls 17 % au lieu de 22 % d’entre eux auraient du être “marsiens”. Cette différence entre distribution théorique et distribution observée est sensiblement la même pour les autres Planètes testées statistiquement à propos d’autres professions. C’est peu mais suffisant pour être considéré comme une anomalie par rapport à une moyenne théorique, et par conséquent pour avoir permis à Gauquelin de jouer au néo-astrologue et pour avoir incité des cohortes de scientistes pseudo-sceptiques à s’adonner à des crises d’hystérie et de tricheries anti-astrologiques.
Passons maintenant en revue les résultats planétaires négatifs des statistiques Gauquelin. Lune, Soleil, Mercure, Vénus, Uranus, Neptune et Pluton n’ont dans un premier temps pas été reconnus comme capables de déclencher de la réussite professionnelle. Plus tard la Lune est apparue comme étant plus fréquemment angulaire chez les poètes, les écrivains voire les politiciens. Dans les statistiques portant sur les “traits de caractère”, les angularités lunaires ont été confirmées et celles de Vénus sont apparues. Mais les résultats sont restés négatifs pour Soleil, Mercure, Uranus, Neptune et Pluton. Les années ont passé, Michel Gauquelin est mort et sa femme Françoise a continué leurs recherches pour voir si elle ne pouvait pas “sauver” d’autres Planètes.
Dans un entretien que j’ai eu avec Françoise Gauquelin, elle m’a confié que Mercure, dont son défunt mari ne voulait pas entendre parler, lui paraissait désormais “le meilleur candidat pour un succès tardif. Par deux fois déjà un chercheur sérieux m’a communiqué un résultat significatif de Mercure angulaire.” Elle ne m’a pas précisé comment ni selon quels critères. Elle est morte peu de temps après notre entretien. Aurait-elle définitivement admis un “effet Mercure” si elle avait vécu plus longtemps ? C’est très probable. Alors que je lui faisais remarquer qu’elle-même avait un Mercure angulaire à l’Ascendant et que je lui demandais si elle se sentait “mercurienne”, elle m’avait répondu que oui. Ce n’est certes pas un argument statisticien, mais venant de sa part, ce n’est pas non plus une réponse fantaisiste ou gratuite.
Inutile d’épiloguer sur le cas des Planètes qui n’ont pas réussi à être retenues par le tamis statisticien des Gauquelin, sinon pour préciser que le critère de la réussite professionnelle associé à une Planète a ici montré ses limites de pertinence. Pour ces Planètes, il ne fait aucun doute que des résultats positifs pourront être obtenus en utilisant d’autres critères plus subtils. En effet, si certaines Planètes ont un certain “effet” sur les comportements humains, on ne voit pas pourquoi et selon quels critères les autres en seraient privées, sauf à penser que certains éléments d’un ensemble organisé n’appartiennent pas à celui-ci.
En fait, il semble presque miraculeux que les Gauquelin aient obtenu des résultats significatifs en se basant sur un critère aussi indiscutablement grossier que celui de la réussite professionnelle. Il faut vraiment que le fait astrologique soit subtilement puissant pour qu’une telle chose improbable ait pu se produire. Mais ce faisant, les Gauquelin n’ont sondé qu’une toute petite partie émergée d’un gigantesque iceberg qui demande encore à être exploré dans sa totalité.
Il va à nouveau sans dire que si les Gauquelin avaient testé des hypothèses propres à l’astrologie conditionaliste, ils auraient obtenu de tout autres résultats, et ce tout particulièrement en testant les familles planétaires “extensives” et “intensives”. Mais c’était trop demander à ces deux crocodiles prédateurs du marigot astro-symboliste où ils se nourrissaient. Je cite à nouveau Jean-Pierre Nicola : “Gauquelin a-t-il une théorie ? Non. S’il était conditionaliste, il se serait réjoui de constater la confirmation de la puissance des planètes au-dessus du plan de l’horizon. Ensuite il n’aurait pas étudié les groupes professionnels sans des connotations indispensables sur le milieu social d’origine. Il aurait alors pu étudier les rapports de pourcentage entre les signatures jupitériennes s’accomplissant dans la députation ou le sport selon l’origine sociale et les moyens familiaux. Ou encore, les rapports de pourcentage entre les signatures ‘Mars’ chez les chefs d’entreprise de sexe masculin et les ‘autres’, les ‘Mars’ de l’autre sexe… M. Gauquelin aurait alors fait œuvre révolutionnaire, édifiante pour tous. L’hypothèse de départ - très hypothétiquement conditionaliste - se serait affinée ou transformée. Elle s’écroulerait définitivement si les statistiques ne signalaient aucune différence entre un chef d’entreprise marsien masculin et une chef d’entreprise marsienne malgré le sexe. Bref, M. Gauquelin, les ‘Mars’, quel que soit le sexe, ont-ils des chances égales de devenir chefs d’entreprise ? Vous pensez bien que je ne crains rien pour le conditionalisme !”
Les Aspects sont des distances angulaires entre Planètes dans le référentiel spatial ou les phases caractéristiques d’un cycle ou d’un intercycle dans un référentiel temporel. Les résultats des tests astro-statistiques ont tous été négatifs : selon Michel Gauquelin donc, les Aspects astrologiques n’auraient aucun effet.
Pour parvenir à ce résultat, Gauquelin s’est fondé sur quatre principales études qui sont en fait ses propres réfutations statistiques d’études de Choisnard. La première étude a porté sur la comparaison des Aspects formés entre le Soleil et la Lune avec Vénus, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune à la naissance et à la mort de milliers de morts illustres. La deuxième a porté sur la comparaison des Aspects formés entre le point Ascendant et Mars, Saturne, Uranus et Neptune à la naissance et à la mort d’un demi-millier de prêtres. La troisième a porté sur la comparaison des Aspects formés entre le Soleil, la Lune et Mars, Saturne, Uranus et Neptune à la naissance de plus d’un demi-millier de criminels. Enfin, la quatrième a porté la comparaison des Aspects formés entre la Lune et Jupiter à la naissance de plus d’un millier de médecins français célèbres et lors de leur élection à l’Académie de Médecine.
L’hypothèse de départ n’était donc que de contrôler la validité de deux des assertions les plus stupides et caricaturales de l’astrologie dominante selon lesquelles 1) la date précise de la mort serait prédictible et 2) les “transits” de Jupiter sur la Lune seraient systématiquement associés à des échéances socialement gratifiantes. Un astrologue expérimenté, observateur et doué de raison aurait pu prédire à Gauquelin que les résultats seraient négatifs et par conséquent lui éviter des mois de laborieux calculs en une époque ou le traitement informatique des données n’existait pas encore. Il faut pourtant savoir que c’est uniquement sur ces résultats négatifs que Gauquelin s’est fondé pour affirmer que les Aspects n’avaient aucun effet, ni à la naissance, ni dans le domaine prévisionnel, ce qui est particulièrement stupide et arrogant.
Après la mort de Michel pour cause de suicide imprédictible par l’astrologie, Françoise s’est relancée dans l’étude statistique des Aspects, persuadée que leurs “résultats professionnels, montrant des zones fortes aux quatre angles du thème natal, produisaient nécessairement des aspects ‘durs’ (multiples de 90°) plus fréquents que la moyenne pour des nativités de personnages ayant très bien réussi leur vie.” Il est vrai que les Thèmes comportant de multiples angularités planétaires sont plus fréquemment que les autres marqués par des oppositions angulaires (dans l’axe AS-DS ou MC-FC) et un peu moins fréquemment par des carrés angulaires, pour de pures raisons astronomiques.
Françoise Gauquelin, qui était à tu et à toi avec le petit monde des astro-symbolistes, a eu des pudeurs de douairière avant d’oser aller jusqu’au bout ce cette hypothèse sacrilège (les oppositions et les carrés passent pour “maléfiques” dans ce milieu). Je la cite : “Je craignais que cette thèse ne cause quelques remous (…). Nos professionnels célèbres avaient significativement plus d’aspects ‘durs’ que ‘doux’ pour expliquer leur réussite professionnelle. Je ne rentrerai pas dans le détail des controverses que cela suscita, comme prévu. Personnellement je ne pense pas que ce résultat infirme vraiment les traditions sur les aspects. Une réussite professionnelle éminente ne s’obtient pas sur un lit de roses, et les aspects ‘durs’ s’adaptent bien, à mon avis, à cette situation. Ce qui compte ici, c’est que la controverse violente qui suivit mon premier résultat incita plusieurs informaticiens à me procurer tous les groupes de contrôle nécessaires pour prouver et re-prouver plusieurs fois que mon premier résultat était solide. Ceci m’apprit accessoirement que les fréquences astronomiques théoriques sont incroyablement agitées, irrégulières pour les aspects.” Cette dernière phrase prouve d’ailleurs que Michel Gauquelin n’avait jamais fait de véritables recherches sur les Aspects en dehors de celles portant sur la prédictibilité de la mort, contrairement à ses affirmations.
Concernant les Aspects, Françoise Gauquelin a simplement fini par reconnaître que les Aspects dissonants, loin d’être “maléfiques”, ne font qu’indiquer des tensions, et les Aspects consonants, des détentes qui n’ont rien non plus de “bénéfique” en soi. Tout dépend de ce qu’on fait de ses tensions et détentes. Si les Gauquelin avaient pris en compte les conceptions de l’astrologie conditionaliste sur ce sujet, ils n’auraient jamais cherché à tester le caractère “maléfique” ou “bénéfique” des Aspects. Mais avec les Gauquelin, ça a toujours été comme ça : ce qu’ils cherchaient à valider statistiquement n’a jamais été la réalité complexe des influences zodiaco-planétaires, mais le discours que les astro-symbolistes tenaient sur elles. C’est un peu comme si un statisticien décidait de tester la validité de la médecine en ne se fondant que sur les théories et pratiques des Diafoirus père et fils, médecins cuistres et charlatanesques dans la pièce de Molière Le Malade imaginaire.
Il faut distinguer les significations traditionnellement attribuées aux Maisons, considérées par les astrologues comme des “champs d’expression” spécifiques des effets zodiacaux-planétaires, de l’influence qu’on leur prête en tant que facteurs de hiérarchisation des mêmes effets.
Selon Michel Gauquelin, les significations attribuées à chaque Maison sont infirmées. Il n’a pas donné le détail des hypothèses qu’il a testées pour parvenir à ce résultat négatif, ce qui constitue une faute méthodologique de la part de ce donneur de leçons. On peut néanmoins le soupçonner d’avoir été aussi peu rigoureux sur ce sujet que pour le traitement du problème des Aspects (voir ci-dessus). Même s’il avait détaillé ces hypothèses, cela n’aurait certainement rien changé quant aux résultats négatifs : les significations traditionnellement attribuées aux Maisons ressemblent à un irrationnel inventaire de Prévert qu’il est impossible de tester autrement que par des méthodes psychédéliques.
Les statistiques Gauquelin ont par ailleurs partiellement invalidé l’influence des Maisons en tant que facteurs de hiérarchisation des puissances planétaires. L’astrologie classique prétend en effet que les 4 “angles” de la sphère locale (lever & coucher à l’horizon, culminations supérieure et inférieure au méridien) et les Maisons “angulaires” I, X, VII et IV qui leur sont immédiatement consécutives dans le sens sénestrogyre étaient les secteurs les plus valorisants pour les Planètes qui y étaient situées.
Les statistiques Gauquelin ont confirmé l’importance des 4 “angles” mais infirmé le caractère planétairement valorisant des Maisons “angulaires”. Les Maisons les plus influentes sont selon ces études les XII, IX, VI & III, donc celles qui sont immédiatement consécutives aux 4 “angles” dans le sens dextrogyre.
Ces résultats ont fait l’effet d’une bombe chez les astrologues, en ce qu’ils remettaient profondément en question l’importance que la tradition dominante attribuait aux Maisons “angulaires”, censées renforcer au maximum l’influence planétaire, et les Maisons “cadentes” qui les précèdent et qui sont censées affaiblir au maximum les Planètes qui y sont situées. Mais ils n’ont pas surpris ceux qui étaient au courant d’autres traditions et d’autres recherches statistiques antérieures, ainsi que les astrologues les plus observateurs parmi les praticiens, qui avaient depuis longtemps repéré ce phénomène. L’historique de ces observations et théories concernant les Maisons comme opérateurs hiérarchiques des puissances planétaires vous est exposé dans la section consacrée aux Maisons à la suite du bilan des statistiques Gauquelin.
Il faut toutefois noter que l’étendue des “secteurs-clés” gauqueliniens a évolué au cours de ses recherches, les données s’accumulant et les années passant. La première mouture (était-ce un hasard statistique ou une volonté délibérée ?) prenait l’exact contrepied des Maisons angulaires “traditionnelles” (c’est-à-dire en réalité post-ptoléméennes, comme nous le verrons en détail plus loin). Mais la seconde, que l’on retrouve par exemple dans son livre Le Dossier des influences cosmiques (1972), élargissait l’étendue de ces secteurs à la fin des Maisons I, X, VII et IV dans le sens du mouvement journalier. Pour la clarté de l’exposé, il faut ici reproduire les graphiques successifs des “secteurs-clés” :
Par ailleurs, certaines des interprétations qu’il fait de Thèmes de célébrités dans ce livre et dans les suivants montrent qu’il prend des libertés avec les étendues des “secteurs-clés” du DS et du FC, qu’il n’hésite pas à faire déborder largement en Maisons VI et III et un peu moins en VII & IV. Il a ainsi un jour confié, vers la fin de sa vie, que ses statistiques donnaient des résultats plus significatifs s’il élargissait ces zones comme il l’avait auparavant fait pour les “secteurs-clés” de l’AS et du MC. On retrouve en 1985 un graphique du même type que celui ci-dessous dans la version française du livre de Françoise Gauquelin Psychologie des planètes, à ceci près que n’y figurent pas les extensions en Maisons VII & IV. Chez Michel Gauquelin, cela correspondrait à un graphique ressemblant à celui-ci :
Mais revenons au livre Le Dossier des influences cosmiques. On trouve pages 108 & 109 un portrait d’Éleanora Duse, actrice italienne considérée comme un exemple de comédienne “pudique” et donc saturnienne non-jupitérienne. L’angularité de Saturne dans son Thème natal ne fait pas de doute. Une photo d’elle figure dans ce paragraphe et, à gauche de celle-ci, on en trouve une autre, celle de Brigitte Bardot, les deux étant légendées par une unique phrase : “Bardot et la Duse : deux générations d’actrices mais aussi deux sens de la vie différents.” Ce qui laisse à penser que Bardot serait l’inverse d’une saturnienne “pudique”, sinon, pourquoi accoler les photos des deux actrices alors que le Thème de Bardot n’est pas interprété ?
Effectivement, Bardot n’est pas saturnienne… mais selon les statistiques Gauquelin elle ne peut être jupitérienne, étant donné que Jupiter se trouve en secteur 8, certes proche de sa culmination supérieure, mais en-dehors du “secteur-clé” du MC. Et son heure de naissance (12 h 15) n’étant pas ronde, elle est probablement assez exacte. Néanmoins on ne peut s’empêcher de penser que Michel Gauquelin ait eu la tentation de faire d’elle une jupitérienne quand même, par symétrie astrale avec la Duse… mais qu’il a fini par y renoncer, prisonnier de sa règle.
Pour le consoler à titre posthume, on peut faire subir aux 36 secteurs de sa grille statistique une rotation de 10° qui correspond à une correction horaire de –40’. Ses “secteurs-clés” concernant des naissances comprises entre 1800–1950, donc comportant un très grand nombre d’heures très imprécises et généralement rondes, et sachant que les arrondissements se font presque toujours à l’unité horaire supérieure, cette rectification n’a rien d’abusif. Cette rotation sénestrogyre a pour résultat de faire de Brigitte Bardot une jupitéro-mercurienne, ce qui lui va comme un gant. Et la même rotation fait que ce graphique (ci-dessous) ressemble étonnamment… à celui au graphique de l’astrologie conditionaliste qui est à la base de la détermination des Planètes angulaires de notre logiciel Astrosoft !
Un autre effet positif des statistiques gauqueliniennes a été de valider le fait que l’arc diurne (au-dessus de l’horizon) avait un effet “excitateur” qui renforçait les puissances relatives des planètes, alors que l’arc nocturne (au-dessous de l’horizon) avait un effet “inhibiteur” qui diminuait celles-ci. Les influences astrologiques étant un tout homogène, les Gauquelin ont ainsi validé malgré eux (ils ne s’en sont jamais rendu compte) le zodiaque photopériodique conditionaliste, fondé entre autre sur les temps de présence et d’absence des planètes au-dessus du plan horizontal qui est directement indexé sur les déclinaisons planétaires nord et sud.
Les Gauquelin réalisèrent au milieu des années 1960 une étude statistique portant sur la comparaison des horoscopes de parents et de leurs enfants, fondée sur le critère des “traits de caractère”. Ils ont cru constater que si le père ou la mère étaient nés sous des angularités de Lune, Vénus, Mars, Jupiter ou Saturne, leurs enfants avaient tendance à naître plus souvent que d’autres enfants avec la même planète dans les mêmes zones AS, MC, DS & FC, et que cette fréquence, d’assez faible amplitude, doublait si les deux parents avaient la même angularité planétaire dans les mêmes zones. Il y aurait donc une “hérédité planétaire”, dont l’effet s’atténuerait progressivement de génération en génération.
Ils ont aussi constaté que cet “effet planétaire en hérédité” avait tendance à disparaître en cas de naissances provoquées médicalement. Plus exactement, cet effet planétaire persistait, mais avec un sensible décalage des angularités planétaires communes aux parents et aux enfants. Il y aurait donc une connexion entre génétique et astrologie, le bébé choisissant en quelque sorte pour venir au monde le moment du passage d’une planète dans une zone d’angularité similaire à celle de la même planète dans le ciel de ses géniteurs. Les Gauquelin en ont tiré la conclusion abusive car non démontrée que les bébés nés lors d’accouchement provoqués ne venaient pas au monde sous leur “vrai” horoscope, mais sous un autre, décidé par l’obstétricien. Cet horoscope obstétriquement programmé ne correspondrait pas à leur caractère, mais ce n’est qu’une hypothèse qui n’a pas été statistiquement testée, pas plus que la profession future de ces bébés “statistiquement dénaturés”.
Cette première étude statistique a fait l’objet d’une 2e réplication avec des cohortes différentes. L’écart à la moyenne des fréquences observées avait toujours une très faible amplitude. Ce très faible écart n’a pas empêché Michel Gauquelin de faire de “l’hérédité planétaire” un pilier de la nouvelle science astro-statistique qu’il appelle depuis peu “cosmopsychologie”. Dans tous les livres qu’il écrivit par la suite, un chapitre très important lui était consacré. En effet, il estimait que “l’hérédité planétaire” constituait sa découverte la plus importante par le fait qu’elle établissait un pont avec la génétique et donc la science. Et justement, Gauquelin rêvait et ambitionnait d’être reconnu comme un grand découvreur scientifique…
Mais contrairement à ce qu’il fit pour ses résultats statistiques sur les angularités planétaires et les groupes professionnels, il se garda bien de demander à des comités scientifiques de contrôler et réitérer ceux concernant son “hérédité astrale” : il savait bien que l’écart à la moyenne des fréquences qu’il avait obtenu était beaucoup trop réduit pour qu’il soit considéré comme signifiant. D’ailleurs aucun comité anti-astrologiste ne chercha à répliquer ces deux études à sa propre initiative, ce qui est très curieux étant donné qu’une telle réplication aurait presque à coup sûr invalidé la prétendue “loi de l’hérédité astrale” dont se gargarisait Gauquelin.
Une 3e réplication ultérieure n’a pas permis d’obtenir de résultats significatifs alors qu’elle portait sur une population double de celle utilisée pour les deux premières études, qu’elle aurait par conséquent dû très nettement confirmer si “l’hérédité astrale” existait réellement.
Une étude fut réalisée en 1990 par Suitbert Ertel, statisticien, professeur de psychologie, sceptique mais ouvert à l’inconnu donc peu suspect d’être a priori anti-astrologiste. Réalisée à partir d’une très faible cohorte de 110 célébrités professionnelles faisant partie de celles déjà utilisées par les Gauquelin, elle avait pour but d’essayer de déterminer si ces derniers n’avaient pas été des victimes conscientes ou inconscientes de “biais de confirmation” dans les corrélations qu’ils avaient établies entre angularités planétaires et “traits de caractère”. Le résultat montra que c’était bien le cas. C’est du moins ce qu’en conclut Suitbert Ertel en dépit du fait que sa propre étude ne portait que sur un nombre trop réduit d’individus pour qu’elle puisse être considérée comme signifiante par des statisticiens orthodoxes. Et de cette conclusion statistiquement peu signifiante, il inféra que la prétendue “loi de l’hérédité astrale” n’était qu’un artefact, non seulement parce que les écarts à la moyenne sur lesquels elle reposait étaient trop faibles, mais aussi parce qu’elle reposait aussi sur les “biais de confirmation” des “traits de caractère” parents-enfants identiques à ceux sur lesquels elle reposait aussi. Michel Gauquelin mourut peu après la publication de cette étude, ce qui ne lui permit pas d’exposer en détail ses objections à l’étude de Suitbert Ertel.
La prétendue “loi de l’hérédité astrale” n’était donc probablement qu’un artefact, une fausse découverte. Son invalidation montre qu’il faut se garder de tirer des conclusions hâtives de faibles écarts à la moyenne, surtout si ceux-ci sont les résultats d’une hypothèse de départ trop susceptible d’être minée par des “biais de confirmation” comme l’était celle des “traits de caractère”.
Cette fausse découverte pose néanmoins des questions importantes : serait-ce le bébé qui “choisirait” son heure de naissance afin de naître statistiquement sous des astralités assez fréquemment identiques à celles de ses géniteurs ? Son heure de naissance “réelle” est-elle celle qui est biologiquement programmée par ce phénomène d’hérédité astrale, ou celle du moment où se produit sa sortie de l’utérus, quelles que soient les conditions naturelle ou provoquée de sa naissance ? Michel Gauquelin s’alarmait d’ailleurs de la systématisation des accouchements artificiels, qui risquaient de faire disparaître cet “effet planétaire en hérédité” et, avec lui, toute la “néo-astrologie” dont il se considérait comme le néo-pape. Mais il semble que la disparition de cet “effet planétaire en hérédité” soit un artefact artificiellement provoqué par la précision croissante des heures de naissance déclarées tout au long du XXe siècle. Cette hypothèse hautement probable est développée dans une section ultérieure.
Pour tenter de répondre, au moins partiellement à ces questions, je suis ici obligé d’exposer mes observations personnelles. Dans le cadre de mes consultations astrologiques, j’ai toujours demandé à mes consultants de se procurer les heures de naissance des membres de leur famille nucléaire. Je n’ai jamais observé de similitudes systématiques entre les Thèmes des parents et des enfants. Par ailleurs, en ce qui concerne l’heure de naissance, il m’est très souvent arrivé (surtout au début, lorsque je ne demandais pas systématiquement la vérification de l’exactitude de cette donnée auprès de l’État-Civil), en m’entretenant avec mes consultants, de constater que ce que je percevais et analysais de leur fonctionnement psychologique ne correspondait pas au Thème monté selon l’heure qu’ils m’avaient donnée. J’interrompais alors la consultation, leur disais que cette heure était probablement fausse et qu’il fallait par conséquent qu’ils la vérifient auprès de l’État-Civil. Bien sûr, il y a des exceptions à cette règle. Il arrive que l’heure officiellement déclarée soit totalement erronée, mais c’est relativement rare… et là aussi, c’est quelque chose qui se repère assez facilement en consultation, pourvu qu’on soit nanti d’un bon sens de l’observation psychologique et capable de bonnes déductions astrologiques. C’est parfois dans les souvenirs de la mère que se trouve l’heure de naissance “vraie”.
Or il se trouve que presque à chaque fois j’avais raison, et que leur “vraie” heure natale, celle qui permettait de dresser un horoscope correspondant à leur fonctionnement observable, était l’officielle ou celle rectifiée par la mère ou un participant à l’accouchement ayant une bonne mémoire. Cela aussi concernait tous les individus, qu’ils soient nés avant ou après 1960. Il semble donc bien que l’heure qui importe soit celle de la sortie de l’utérus, que l’accouchement soit naturel ou programmé. Bien entendu, ces expériences et ces observations personnelles portant sur moins d’une centaine de cas ne sont pas comparables avec des statistiques portant sur des milliers. Les conclusions que j’en tire restent provisoires et ne font pas l’impasse sur la possibilité d’un phénomène d’“hérédité astrale” de très faible amplitude qui pourrait être perturbé par les accouchements provoqués.
Le problème revient à se demander, dans le cas de naissances non-provoquées artificiellement, si c’est le bébé qui déclenche l’accouchement naturel, ou sa mère, ou le couple mère-enfant. Cette question fait toujours débat. Pendant le XIXe siècle et jusque dans le 1er tiers du XXe, les scientifiques affirmaient que c’était la mère et elle seule qui “décidait” inconsciemment du moment de l’expulsion du futur nouveau-né. Puis les opinions changèrent et cette affirmation catégorique passa de mode lorsqu’il fut découvert qu’il était probable que c’était le fœtus qui envoyait des messages chimiques signalant qu’il était prêt à faire sa sortie extra-utérine. La nouvelle doxa fit donc du fœtus le décideur de l’accouchement.
C’est pendant cette période du bébé-roi que les Gauquelin formulèrent leur hypothèse de l’hérédité astrale. L’hypothèse du bébé seul décideur de sa sortie extra-utérine les arrangeait bien : c’est lui qui “choisissait” naturellement de naître sous l’horoscope qui lui convenait pour ressembler à ses parents, ce qui relève d’une conception très conservatrice et simpliste de la famille… Et si les accouchements étaient artificiellement provoqués, cela signifiait que le bébé ne naissait plus sous les configurations planétaires qui lui “correspondaient”, mais sous celles que l’obstétricien avait choisies pour lui, et qui ne lui “correspondaient” donc pas. Ce manque de “correspondance” permettait aux Gauquelin de justifier les décalages des positions planétaires entre les Thèmes des enfants et des parents et de sauver l’interprétation qu’ils avaient fait de leurs premiers résultats en mettant sur le compte des interventions obstétriques les résultats postérieurs qui s’en écartaient.
Mais au cours de la seconde moitié du XXe siècle, la doxa de la parturience changea à nouveau. Cette fois, ce fut le couple mère-enfant qui fut considéré comme le co-décideur à parts égales du moment de l’accouchement naturel. Cette nouvelle approche gêna les Gauquelin dans leurs conclusions : si le bébé n’était plus le seul décideur de son horoscope, si l’horoscope de naissance était le fruit d’une co-décision paritaire, l’hypothèse d’un horoscope “naturel” dont le futur nouveau-né serait le seul agent disparaissait. Si la mère et le fœtus œuvraient de concert pour procéder à l’expulsion, cela signifiait que l’intervention d’un obstétricien, qui pouvait hâter ou retarder ce moment, n’était plus un crime contre la “néo-astrologie”, et l’horoscope natal du nouveau-né était tout aussi valable que l’heure de la naissance ait été naturellement ou artificiellement programmée.
Les recherches en hérédité astrale des Gauquelin ont néanmoins eu pour effet positif de poser une question cruciale et d’essayer d’y répondre : quand naît-on ? La naissance n’est en effet pas un phénomène instantané, mais un processus qui se met en marche depuis l’heure des premières contractions jusqu’à celle de l’expulsion du bébé. Autres questions cruciales : vit-on mieux avec son horoscope natal, l’intègre-t-on mieux si l’accouchement a été naturel que s’il a été artificiellement programmé ? Est-il possible que les accouchements artificiels nous fassent naître sous des horoscopes qui ne nous “correspondent” pas ou même, comme le prétendait Michel Gauquelin, qui n’ont aucune influence sur nous parce qu’ils désobéissent à une hypothétique “hérédité astrale” ? Ce qui revient à poser d’autres questions : quel rapport existe-t-il entre hérédité et influence astrologique ? L’hérédité décide-t-elle seule, au niveau du couple mère-enfant, d’une heure de naissance qui correspondrait à un hypothétique horoscope “naturel” ? Ou bien la complexité des phénomènes en relations et interactions qui agissent sur l’accouchement permet-elle une souplesse adaptative dont l’intervention d’un obstétricien n’est qu’un des facteurs ?
Difficile de répondre à ces questions. Il n’est pas impossible qu’il existe une probabilité de transmission discrète de caractères “astro-génétiques” généraux, mais celle-ci n’a absolument rien de certain. Ce sont de vastes continents qu’il reste à explorer. Nous en resterons là pour l’instant. On retiendra de tout cela qu’il est essentiel, pour faire toutes ces recherches, de disposer d’heures de naissance fiables.
Ces recherches statistiques dépendent de l’exactitude des heures de naissance indiquées par l’État-Civil. D’une étude statistique réalisée par l’astrologue Patrick Le Guen et portant sur 1165 heures déclarées à l’EC (État-Civil) entre 1800 et 1970 il ressort que :
▶ de 1880 à 1910, la fréquence des “heures rondes” ou “heures sonnantes” (par ex. 9 h 00, 12 h 00, 21 h 00) est d’environ 80 %.
▶ de 1910 à 1930, cette fréquence passe à environ 60 %
▶ de 1930 à 1960, elle passe à environ 35 %
▶ de 1960 à 1970, elle n’est plus que d’environ 17 %.
En presque un siècle, on est donc passé de 80 % de gens qui naissaient à des “heures rondes” à 17 %. Qu’est-il arrivé ?
Une précision moyenne de dix minutes avant ou après l’heure de naissance est en général suffisante pour l’astrologue : pendant ce laps de temps le ciel ne change guère dans la plupart des cas. On peut ainsi découper une journée de 24 h en tranches de 10’. D’après ce découpage, une heure “ronde” a une probabilité de sortie de 1/6, ce qui correspond à une fréquence de 16,66 %. Quelle que soit l’année de naissance, il devrait donc y avoir en moyenne entre 16 et 17 % de gens qui naissent à des heures “sonnantes”.
Cette fréquence de sortie n’est observée que pour les heures de naissance enregistrées à partir des années soixante, qui seules peuvent dans l’ensemble être considérées comme très fiables. Les fréquences horaires des années précédentes sont “anormales”. Reste à expliquer les raisons de cette anomalie. C’est assez simple : jusqu’à la fin de la première moitié du vingtième siècle on n’attachait pas, pour diverses raisons, beaucoup d’importance à la précision de l’heure de naissance. Un individu en fait né à 16 h 45 ou 16 h 35, par exemple, pouvait très fréquemment être déclaré né à 17 h 00. Par ailleurs, on sait que, pour des raisons psychologiques, la plupart d’entre nous préfère les arrondissements (non-commerciaux) à l’unité supérieure, qui est un “plus”, alors que l’unité inférieure est un “moins”.
Il est frappant d’observer qu’au fur et à mesure que les populations rurales émigrent vers les villes et que progresse la médecine (intervention de plus en plus systématique des sages-femmes, naissances de plus en plus fréquentes en milieu hospitalier pourvu d’horloges très précises), la fréquence des “heures rondes” tend à se rapprocher de la moyenne théorique.
La figure ci-dessus, réalisée et adaptée à partir des travaux statistiques des Gauquelin, illustre le décalage des angularités planétaires chez les parents (nés avant 1960) et les enfants (nés après 1960). Chez les parents, les heures imprécises tendent à repousser les zones d’angularités vers les Maisons XII-IX-VI-III ; chez les enfants, les heures précises montrent que les zones d’angularité recouvrent les quatre “Angles” de la sphère locale : l’écart entre les zones d’angularités “traditionnelles” et statistiques s’amenuise à mesure que la précision horaire augmente. Cela signifie que si on refaisait toutes les études de Gauquelin en se basant sur des populations nées en France à partir de 1960, le modèle statistique serait très probablement beaucoup plus proche du modèle “traditionnel” que les Gauquelin ne le croyaient.
Cela démontre aussi que le décalage des angularités entre les Thèmes des parents et ceux de leurs enfants constatés par les Gauquelin n’a pas pour cause l’obstétrique et les accouchements provoqués, mais très probablement l’exactitude croissante des heures de naissance. Ce sont donc davantage les horloges que les forceps qui sont en jeu dans cette affaire…
Ayant statistiquement établi dans les années 1960 qu’il existait une corrélation entre certaines réussites professionnelles et certaines positions planétaires dans la sphère locale, les Gauquelin se lancèrent dans un autre genre d’étude, cette fois basée non sur le métier, mais sur les “traits de caractère”. L’astrologie attribuant à chaque Planète une influence assez précise sur les comportements humains, ils cherchèrent à démontrer que cette corrélation pouvait être statistiquement validée ou invalidée. Ils se basèrent pour ce faire sur sur deux sources de documents. La première était composée de descriptifs biographiques consacrés à des célébrités professionnelles, la seconde de descriptifs astro-psychologiques consacrés à chaque Planète, tirés d’un grand nombre de manuels écrits par les astrologues les plus connus.
Des descriptifs biographiques et astro-psychologiques ils extrairent systématiquement les adjectifs et locutions concernant des “traits de caractère”, dont par la suite ils déterminèrent statistiquement les occurrences. Puis ils entreprirent de comparer les résultats obtenus par les deux sources documentaires, en corrélation avec les planètes corrélées statistiquement avec les diverses professions. Ils entraient là dans le domaine de la psychologie, où les pièges des biais de confirmation sont d’autant plus nombreux que le qualitatif y prime sur le quantitatif et le flou sur la précision.
Jamais les Gauquelin n’ont fait l’effort de conditionaliser ces “traits de caractère” astrologiquement déterminés en les contextualisant, c’est-à-dire en les associant à d’autres paramètres extra-astrologiques qui influent sur les comportements et fonctionnements psychologiques. Or l’héritage génétique, le sexe, la morphologie, l’état de santé, le niveau intellectuel, l’envergure spirituelle, l’éducation reçue et/ou acquise, les apprentissages, les expériences vécues, la socioculture, etc., et bien entendu l’ensemble du Thème astrologique natal, sont autant de variables qui modifient l’expression des “traits de caractère”. On peut même ajouter à ces divers déterminismes le degré de connerie, qui ne figure pas dans l’horoscope de naissance et qui constitue un prisme essentiel filtrant toutes les tendances d’une personnalité, chez les astrologues comme chez les anti-astrologistes.
Les résultats qu’ils obtinrent après des traitements statistiques appropriés de ces données confirmèrent qu’il existait une corrélation significative et positive entre les “traits de caractère” les plus fréquents dans les biographies de célébrités d’une même profession et les “traits de caractère” les plus fréquemment attribués à la ou les Planètes en corrélation avec cette profession. C’est alors que les Gauquelin décidèrent de donner à leurs astro-statistiques le nom de “cosmopsychologie”.
Ces résultats positifs selon eux ne firent jamais l’objet d’une réfutation systématique à l’occasion de réplications conduites par des comités scientifiques anti-astrologistes, que seul “l’effet Mars” semblait exciter. La seule contre-expertise fut menée par Suitbert Ertel en 1990. Elle le conduisit à affirmer que les résultats positifs obtenus par les Gauquelin souffraient d’importants biais de confirmation. Mais cette contre-expertise avait elle-même ses limites, puisqu’elle ne portait que sur un nombre de données insuffisant pour être considéré comme statistiquement significatif.
La méthode utilisée par les Gauquelin pour déterminer les “traits de caractère” associés aux Planètes démontre une fois de plus et sans aucune ambiguïté que ce qu’ils ont tenté pendant 45 ans de labeur acharné n’était pas d’essayer de valider statistiquement d’hypothétiques effets astrologiques, mais de tester les affirmations absolues contenues dans les manuels d’astrologie écrits par des astrologues célèbres, soit pour en démontrer l’inanité globale, soit pour confirmer la pertinence de certaines d’entre elles. C’est un peu comme si un médecin, pour déterminer l’état de santé d’un patient, appliquait son stéthoscope sur un manuel de médecine générale plutôt que sur la poitrine de ce patient, et ce sans savoir si ce manuel a été rédigé par un médecin compétent ou par un charlatan. C’est tout simplement ubuesque.
Les données biographiques, en principe vierges de toute trace astrologique, dont sont extraits des “traits de caractère”, sont elles-mêmes des sources sujettes à caution. Elles ne concernent en effet que des personnages célèbres dans leur domaine, et les biographies de célébrités, qui sont rarement écrites pas des psychologues considérés comme compétents, s’accompagnent toujours de tentations hagiographiques qui faussent inévitablement les descriptifs de “traits de caractère” qu’elles recèlent. Ce ne sont donc pas en elles-mêmes des sources fiables. Elles demandent à être très sévèrement contrôlées et vérifiées en se référant à d’autres témoignages, surtout si elles ont été produites par des journalistes, des pairs amis ou ennemis de ces célébrités, à l’occasion d’hommages nécrologiques ou lors de discours de réception d’un nouveau membre faisant l’éloge obligé du précédent occupant de son siège dans des académies diverses.
Les données extraites des manuels d’astrologie sélectionnés par les Gauquelin sont aussi peu fiables, et c’est le critère même sur lequel il a été procédé à cette sélection qui est en cause. Ce critère est en effet exclusivement celui de la célébrité des astrologues qui ont rédigé ces manuels qui sont donc les plus vendus, non en raison de la qualité ou de la pertinence de leur contenu, mais en raison de la notoriété de leurs auteurs.
Or ce critère de célébrité commerciale est parfaitement inadéquat et même profondément débile, puisqu’il ne sanctionne en rien une compétence. C’est même exactement l’inverse dans le domaine de l’édition astrologique comme dans bien d’autres : le succès commercial ne va en général pas aux meilleurs ni aux plus compétents, mais à ceux qui répondent le mieux aux attentes du public visé. Et c’est encore plus flagrant dans le domaine de l’astrologie où pullulent les bonimenteurs, les charlatans, les débiteurs de recettes obsolètes, les partisans de diverses “écoles” et autres ignares et incompétents en la matière qu’ils prétendent représenter.
Si l’on exclut cette engeance - ce que n’ont pas fait les Gauquelin - on pourrait ne retenir (selon quels critères indiscutables ?) que les quelques représentants honnêtes et apparemment sérieux de ce qu’on appelle l’astrologie “savante” qui ont quand même réussi à se faire un nom et à vendre un assez grand nombre de manuels. Hélas la plupart d’entre eux ne font que se référer à des conceptions de l’astrologie datant d’il y a 2000 ans, qu’ils ont plus ou moins remises au goût du jour en utilisant un vocabulaire plus moderne, et adaptées aux courants et écoles astrologiques auxquels ils se rattachent et selon le degré de traditionalisme ou de pseudo-modernisme qui les caractérise.
C’est de cet ensemble hétéroclite que les Gauquelin ont extrait leurs données sous la forme d’une liste des “mots-clés” le plus souvent attribués à chaque Planète. Françoise Gauquelin note à ce sujet, dans son livre La Psychologie des planètes, qu’un mot-clé “donné par un seul astrologue est le plus souvent contredit [par les traits de Gauquelin]”, alors qu’un mot-clé donné par “plus d’un astrologue… est le plus souvent confirmé”. En réalité et en moyenne, 44 % de ces mots-clés correspondaient bien à la planète concernée, 22 % concernaient une autre planète, et 34 % ne correspondaient à rien. De plus cette remarque de Françoise Gauquelin montre qu’elle était en plein biais de confirmation. En effet, le fait qu’un mot-clé donné par un seul astrologue soit le plus souvent contredit ne signifie pas nécessairement que cet astrologue se trompe, mais peut aussi signifier que les “traits de caractère” que Michel Gauquelin a tirés des occurrences lexicales puisées dans la masse hétéroclite des manuels d’astrologie les plus vendus sont peut-être pour une grande partie non-pertinents. Un unique astrologue compétent et savant peut très bien avoir raison contre toutes ces listes de “traits de caractère” gauqueliniens. La quantité, surtout en matière de volumes de ventes de manuels d’astrologie, n’est pas synonyme de qualité. C’est plutôt l’inverse.
Et cela, les Gauquelin le savaient très bien, du fait de leur fréquentation assidue des milieux astrologiques. Ils se sont donc rendus coupables, non d’une simple erreur d’appréciation dans le choix du critère de la célébrité et des retombées commerciales y afférent, mais d’une très grande faute déontologique doublée d’un monumental biais de confirmation.
C’est d’autant plus évident qu’ils savaient parfaitement qu’ils pouvaient tester leurs hypothèses en se fondant sur les écrits d’astrologues sérieux et compétents, dont ils connaissaient très bien l’existence. Ils auraient alors réellement fait preuve d’un esprit scientifique audacieux. Certains de ces astrologues sérieux et compétents leur ont proposé de faire des études statistiques. Les Gauquelin n’ont jamais accédé à leurs demandes et leur ont toujours répondu par le silence ou une fin de non-recevoir.
Les célèbres et hégémoniques astrologues traditionnels ou traditionalistes, compétents ou non, savants ou charlatans et quelle que soit l’école dont ils se réclament, ont quand même un point commun : tous se réfèrent implicitement ou explicitement, dans leurs écrits, à une interprétation des effets planétaires qui remonte au IIe siècle et qui a très peu évolué depuis, et tous se recopient plus ou moins les uns les autres. Il est donc logique que le traitement statistique des occurrences des “mots-clés” montre une certaine unité dans les significations attribuées aux Planètes. Et comme ces significations ont un certain degré de pertinence relative, même si elles sont pour la plupart simplistes, datées et souvent caricaturales, il n’est pas étonnant que les études des Gauquelin, si imparfaites, morcelées et simplistes soient-elles, aient ainsi validé partiellement ces significations traditionnelles.
Il n’en reste pas moins que ce qu’ont testé les Gauquelin n’est pas l’effet d’une planète sur un comportement humain décrypté par des astrologues contemporains et compétents qui leur ont proposé des tests non-verbaux pour valider ou invalider leurs propositions et hypothèses, proposition qu’ils ont refusée. Ce qu’ils ont testé en réalité, c’est ce qu’a écrit une majorité d’astrologues passéistes sur les effets de cette planète dans des ouvrages de vulgarisation qui ont dans leur ensemble un très bas niveau.
Il va de soi que les Gauquelin auraient obtenu des résultats autrement plus pertinents et décisifs s’ils n’avaient pas été obsédés (surtout Michel) par la célébrité, que ce soit la leur, celle des professionnels auxquels ils ont consacré leurs statistiques et celle des astrologues qui leur ont servi de référence. Cette obsession de la gloire était particulièrement dévorante chez Michel Gauquelin. Elle lui fit écrire en 1965, alors qu’il ne faisait que commencer ses astro-statistiques, que les “nouveaux savants qui cherchent à comprendre les rapports des cieux avec la Terre” verraient leurs noms figurer “dans le Larousse du XXIe siècle”. Inutile de préciser que dans son esprit affamé de célébrité ces “nouveaux savants” se réduisaient à un seul : lui-même.
Ce choix délibéré de la célébrité induite par la réussite professionnelle comme critère suprême de sélection des cohortes représentatives a par ailleurs été au centre de tous les débats et controverses entre Michel Gauquelin et les divers comités anti-astrologistes. La célébrité est en effet une chose très difficile à quantifier. Où finit la simple renommée ? Quand commence la véritable célébrité et combien de temps dure-t-elle ? Quels exploits physiques, socioculturels ou intellectuels faut-il avoir accomplis pour pouvoir y accéder et ainsi bénéficier de l’attention publique ? À partir de quelle étendue de couverture médiatique, de quel nombre de biographies qui lui ont été consacrées un individu peut-il être considéré comme réellement célèbre ? Comment mesurer la démesure qu’implique la célébrité ?
Fait remarquable, toutes les critiques des scientistes contempteurs de “l’effet Mars” portaient sur ce sujet central. Les anti-astrologistes les plus indulgents soupçonnaient Gauquelin de biaiser a priori les données en plaçant le curseur de la célébrité soit trop haut, soit trop bas. Les plus sévères l’accusaient carrément de tricher en situant ce curseur exactement là où ça l’arrangeait pour obtenir les résultats désirés. Les pires de ces derniers, et ils furent légion, décidèrent même que le curseur qui discriminait dans un certain flou les inconnus des renommés, les moins des plus célèbres, n’était qu’une mesure arbitraire dont on pouvait se passer, ce qui était un comble d’absurdité pseudo-sceptique. Mais les anti-astrologistes plutôt indulgents comme les modérément sévères étaient confrontés au même problème que Gauquelin lui-même : où tracer la frontière entre célébrité et non-célébrité ? Ils avaient exactement la même difficulté à la définir avec des critères indiscutables. Et certains d’entre eux, tels Kurtz, entendaient bien profiter de “l’effet Mars” pour devenir célèbres à leur tour…
En plaçant le curseur de la célébrité très haut, c’est-à-dire en ne sélectionnant que l’élite connue et reconnue des hyper-célébrités, Gauquelin s’exposait à n’avoir que des cohortes peu nombreuses et donc des résultats statistiquement peu signifiants et susceptibles d’être les objets de nombreux biais astronomiques ou démographiques. Et de toute façon, la limite entre petite et grande célébrité est tout aussi difficile à situer.
Nombreux furent donc ses adversaires scientistes à avoir accusé Michel Gauquelin de tricher en situant le curseur de la notoriété à un niveau lui permettant d’obtenir les résultats souhaités. Les insinuations fielleuses après son suicide montrent même que certains parmi les plus éhontément tricheurs n’ont pas reculé devant l’accusation suprême : selon eux on l’a vu, il se serait tué parce qu’il craignait - pour sa renommée ? - que soit dévoilée une gigantesque tricherie dont il aurait été l’auteur pendant presque un demi-siècle. La propagation de la fausse rumeur selon laquelle il aurait demandé à l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours de détruire toutes ses données en serait la preuve la plus flagrante.
Cette accusation est non seulement mensongère, mais aussi absurde. Jamais Michel Gauquelin ne s’est dérobé devant les demandes de réplications et de contre-expertises de ses adversaires scientistes, et c’est même très fréquemment lui qui a été en position de demandeur. Il leur a toujours communiqué ses données, et ils s’en sont abondamment servis. Il faudrait vraiment être un tricheur stupide et inconséquent pour agir de la sorte pendant un demi-siècle dans un domaine où les vérifications sont aussi faciles et pointilleuses, de plus en ayant des adversaires dont il savait qu’ils ne lui feraient pas de cadeaux. De sucroît Michel Gauquelin voulait être célèbre - la célébrité, toujours ! - et renommé comme un grand découvreur scientifique. Et pour cela, il se devait d’être aussi irréprochable que possible dans ses protocoles expérimentaux.
Ses adversaires scientistes les plus indulgents se sont contentés de l’accuser d’avoir eu recours à des biais subjectifs dans ses choix de positionnement du curseur entre inconnu et connu, célébrité et non-célébrité. Ils avaient très probablement raison, cela d’autant plus qu’en près d’un demi-siècle de recherches, il a été amené à changer plus ou moins le positionnement de ce curseur à l’intérieur de la zone évolutive du connaissable qui se situe entre le connu et l’inconnu du savoir en général, ou bien entre la renommée et l’anonymat des professionnels dans le cas particulier qui nous intéresse ici. Mais il a toujours communiqué loyalement les informations à ce propos. Dans la phase finale de sélection des cohortes représentatives, ses adversaires scientistes ont systématiquement essayé de déplacer le curseur afin que les résultats de leurs réplications de “l’effet Mars” minimisent celui-ci ou l’invalident en le rendant insignifiant. Michel Gauquelin était alors obligé de se défendre, et sa défense n’était pas toujours exempte de biais de confirmation… tout comme les attaques dont il était l’objet qui souffraient toutes, elles, de biais de déni.
Vous avez pu remarquer que l’auteur de cet article ne peut être soupçonné de vouloir défendre Michel Gauquelin à tout prix. La cause qu’il défendait était tout sauf celle d’une astrologie contemporaine intelligente et bien comprise dont il a toujours été un adversaire déclaré pour une seule raison : il craignait qu’elle ne lui fasse de l’ombre. Cependant les quelques maigres mais indubitables résultats qu’il a obtenus méritent néanmoins d’être défendus.
Comme l’a très justement remarqué le juriste, écrivain et universitaire étasunien Daniel J. Boorstin (1914–2004), une célébrité est surtout “une personne connue pour être bien connue”. Le même Boorstin (qui n’a rien à voir avec “l’effet Mars”) est notamment l’auteur de Les Découvreurs, un formidable livre dans lequel on peut lire cette phrase : “Le principal obstacle à la découverte de la forme de la Terre, des continents et des océans n’a pas été l’ignorance, mais l’illusion de savoir.” Il a vraiment fallu que l’étendue des continents et océans astrologiques voit très vaste pour que les Gauquelin en découvrent une infime partie, alors qu’ils n’étaient équipés pour ce faire que de beaucoup trop d’illusion d’en savoir quelque chose et en ne se fiant qu’à la boussole des astrologues les plus célèbres et les plus vendus.
À l’issue de cette présentation critique, il reste à faire un rapide bilan des astro-statistiques des époux Gauquelin. Pour ce faire citons Jean-Pierre Nicola : “J’insiste sur le fait qu’il faut être extrêmement prudent, aussi bien pour des résultats positifs que pour des négatifs. Non pas par refus ou doute, mais parce que les pièges, en ces matières, sont, statistiquement, très nombreux. C’est en pleine connaissance des causes et effets des méthodes statistiques (pensez aux sondages) que je me suis désolidarisé de l’enthousiasme hâtif des magico-symbolistes portant Gauquelin comme un fer de lance contre le mur scientiste. Le mur existe, en profondeur et en largeur. Mais un esprit réellement scientifique sait que les statistiques n’ont pas une vertu démonstrative. (…) À l’égard des méthodes statistiques, la position conditionaliste a toujours été claire : il faut des vérifications, il en faut beaucoup, pour s’en défier, les contrôler, les refaire avec de nouvelles idées et avec une théorie explicative s’améliorant au gré des résultats. L’astrologie conditionaliste débouche sur un vaste champ d’expérimentations statistiques, mais M. Gauquelin n’a pas d’attrait pour elles : ce n’est pas son rôle de tester des hypothèses qui risquent d’être positives pour l’astrologie. Il nous reste à attendre un statisticien au moins aussi soucieux de vérité que de réussite personnelle (…).
Les statistiques Gauquelin confirment la hausse de l’effet planétaire dans la course diurne de l’astre, sa baisse dans la partie nocturne de son cycle quotidien. Accroissement d’effet également lorsque le champ magnétique terrestre, en corrélation avec l’activité solaire, gagne en intensité. (…) Résultats originaux à contrôler : le rôle des transits dans le mouvement diurne (angularités des dominantes planétaires) lors des douleurs pré-natales et des spasmes précurseurs de la mort (…). L’astro-statistique dispose d’un bilan insuffisant pour une théorie scientifique de l’astrologie, mais indéniable pour l’affirmation d’une relation physique et naturelle entre le ciel et les hommes.
L’astro-statistique de M. Gauquelin a mis en valeur l’influence de cinq planètes sur le groupe des dix utilisé par l’astro-psychologie. Par d’autres travaux, l’auteur a établi pour Lune, Mars, Jupiter et Saturne quatre tempéraments planétaires susceptibles de se combiner entre eux (…) Les analyses biographiques et cliniques de l’astrologie conditionaliste montrent les erreurs et insuffisances d’un tel clavier. Comme l’astro-psychologie symboliste, la statistique ne se reporte pas à d’autres variables que celles contenues dans l’horoscope, déconnectant le récepteur de conditionnements dont un Kepler a fait pourtant largement état. En ce sens, l’astro-statistique est un reflet anti-symétrique de la symboliste : faux complices et faux ennemis, les protagonistes parlent au moins de la même chose, l’horoscope absolu. Aussi l’antagonisme se résout-il lorsqu’il s’agit de ne pas entendre l’astrologie conditionaliste.”
On retiendra également des astro-statistiques des Gauquelin un affinement notoire des zones de valorisation (levers, couchers, culminations supérieure et inférieure) et de non-valorisation planétaire de la sphère locale. Le profil général, quelles que soient les fréquences, a la forme d’une étoile à quatre branches qui se superpose aux axes horizontal et méridien.
Par ailleurs, on rappellera ici qu’à la suite d’une analyse informatisée de ses données en 1984, Michel Gauquelin a conclu que tous les effets d’angularités planétaires étaient nettement confortés statistiquement si l’on incluait les zones situées juste avant les “secteurs clés”… ce qui revenait à élargir les “zones Gauquelin” dans les Maisons I, X, VII & IV “traditionnellement” considérées comme valorisantes par les astrologues qu’il conspuait. Cela, les astrologues conditionalistes le savaient sans faire des statistiques portant sur des dizaines de milliers de cas : la pratique et le sens de l’observation ont suffi pour cela. C’est là un apport capital au savoir astrologique. Désormais, il n’existe plus aucune méthode sérieuse d’évaluation des puissances planétaires relatives qui ne se réfère pas aux résultats obtenus par Françoise et Michel Gauquelin.
En effet, même si l’écart par rapport à la moyenne théorique était un peu plus faible que les 10 à 25 % déterminés par les statistiques Gauquelin - ou si la taille d’effet était un peu inférieure à 0,045 - la démonstration est faite qu’il existe une différence qualitative entre, d’une part les Planètes proches de l’horizon et du méridien, et d’autre part celles qui le le sont pas. Si l’on considère la sphère locale comme un espace à l’intérieur duquel se répartissent les Planètes, on considérera qu’il s’agit d’un phénomène caractéristique d’une anisotropie spatiale (propriété d’un objet relative à sa dépendance à une direction quelconque). Un espace anisotropique est ainsi structuré selon l’orientation de ses parties. Si l’on considère que la même sphère locale est une représentation spatiale d’un schème temporel concernant le cycle journalier des Planètes, le même phénomène sera caractéristique d’une anisotropie temporelle relative au temps de passage en zones horizontale et méridienne. C’est la mise en évidence statistique de cet effet d’anisotropie spatio-temporelle qui importe, et non l’étendue significative des écarts à la moyenne en soi. Elle confirme les observations des astrologues du passé pré-ptoléméen comme du présent, et doit servir de base pour toute méthode de hiérarchisation sérieuse des puissances planétaires… et toute recherche sur les fondements biophysiques des effets astrologiques.
À titre d’information, aucun des deux époux Gauquelin n’a jamais trouvé le temps de faire mine de s’intéresser de près ou de loin aux théories et pratiques de l’astro-conditionalisme, dont ils connaissaient pourtant parfaitement l’existence depuis 1955. Très pointilleux et objectifs lorsqu’il s’agissait de sélectionner leurs sources de données afin d’apparaître comme des scientifiques purs et sans taches, ils ne l’étaient pas du tout pour choisir leurs hypothèses de recherches statistiques : d’emblée, l’astro-conditionalisme en a toujours été écarté. De même, les Gauquelin n’ont jamais cité l’astro-conditionalisme dans aucun des nombreux ouvrages qu’ils ont publié. On est en droit de s’interroger sur la raison d’un tel ostracisme, alors qu’objectivement, l’astro-conditionalisme et l’astro-statistique gauquelinienne rebaptisée sur le tard “néo-astrologie” ou “cosmopsychologie” pouvaient sembler être du même côté : celui d’une approche rationnelle et contemporaine de l’astrologie qui ne prend pas à la légère ses fondements astronomiques.
La raison de cet ostracisme est prosaïque. Les Gauquelin (surtout Michel) se considéraient comme le seul crocodile bicéphale occupant légitime de son marigot néo-astrologique. Dans leur optique, il n’y avait donc pas de place pour un autre croco, considéré comme un redoutable concurrent dans la compétition pour la reconnaissance académique officielle qui hantait le couple Gauquelin. Michel Gauquelin rêvait en effet de devenir le pape scientifique d’une néo-astrologie dont il aurait été le fondateur unique, adulé et reconnu. Or il considérait Jean-Pierre Nicola, découvreur-fondateur de l’astrologie conditionaliste, comme le plus dangereux de ses concurrents, alors même que ce dernier ne s’estimait en compétition avec personne.
Jean-Pierre Nicola, qui l’a souvent croisé à une époque où Gauquelin pouvait en croire que son ambition ultime pouvait se réaliser, donne sur le personnage son témoignage sans concession : “il n’a jamais hésité à se déplacer, téléphoner ou écrire pour tenter de m’interdire là où je voulais parler. Nous aurions du être en procès et, conformément aux règles de politesse que ces procédures impliquent, je lui ai donné l’adresse de mon avocat, ainsi que le nom. J’ai peut-être oublié le timbre pour la réponse, toujours est-il que M. Gauquelin n’a pas donné suite.”
J’ai moi-même contacté Michel Gauquelin par courrier en 1986, en lui demandant de m’expliquer clairement la raison de son omission de toute référence à l’astrologie conditionaliste dans ses livres & travaux. Il m’a répondu que cette approche de l’astrologie n’était pour lui qu’une théorie, et qu’à ce titre elle ne l’intéressait pas. En tant que “scientifique”, m’écrivait-il, il ne s’intéressait qu’aux “faits” statistiquement testables. Ce qui est pour le moins une approche simpliste et naïve de la science. En effet, d’une part les théories sont des “faits de pensée” qui peuvent être l’objet de contrôles statistiques. Et d’autre part il n’existe pas de “faits”, au sens scientifique de ce terme, qui ne soient pas les résultats d’élaborations théoriques préalables qui auront permis de les différencier de simples perceptions. Gauquelin m’a ensuite assuré que si je lui proposais un protocole expérimental qui ne serait fondé sur aucune théorie, il serait peut-être intéressé. C’est ce qui s’appelle une habile et hypocrite fin de non-recevoir mais aussi se moquer du monde. Car il ne pouvait ignorer que toutes ses astro-statistiques étaient fondées sur des “faits” identifiés comme tels par des théories astrologiques vieilles de plusieurs millénaires.
Je n’ai évidemment pas donné suite à cette manœuvre dilatoire. Car en effet, comme l’écrivait Henri Poincaré dans La Science et l’hypothèse, “la route qui mène de la théorie à la réalité va de la théorie au modèle, et ensuite du modèle à la loi phénoménologique. Les lois phénoménologiques sont effectivement vraies des objets dans la réalité – ou pourraient l’être ; mais les lois fondamentales sont vraies uniquement des objets dans le modèle.” Il en résulte qu’il n’y a pas de faits sans théories connues ou inconnues qui les sous-tendent et que Gauquelin a essayé de m’enfumer en refusant de tester “des objets dans [un] modèle”, modèle qu’il refusait de tester pour une raison qui n’a strictement rien de “scientifique”. L’expérimentation statistique ou autre est toujours le test d’une théorie, et dans tout “fait”, statistique ou autre, demeure toujours l’empreinte d’une théorie même si cette dernière n’est pas expressément formulée en tant que telle.
Quinze ans plus tard j’ai eu un entretien avec Françoise Gauquelin qui est paru dans Astrologos. Je lui ai tendu une perche conditionaliste pour tester comment elle réagirait. Elle a refusé de la prendre, préférant esquiver le sujet en parlant immédiatement d’autre chose. Elle non plus ne voulait pas tester de théorie disposant d’un modèle fort et cohérent, et préférait faire des statistiques à la petite semaine en picorant de prétendus “faits” astrologiques sans se soucier du… “fait” qu’ils avaient été préalablement élaborés par d’antiques théories dont la réalité épistémologique lui indifférait autant qu’à son ex-mari. Nous sommes là au cœur du dispositif Gauquelin : des statistiques fréquentistes simplistes mises au service d’un empirisme récupérateur et vérificateur sans vue d’ensemble ni fil conducteur. Il est d’ailleurs remarquable d’observer, à cet égard, que les Gauquelin n’ont proposé aucune théorie explicative des résultats de leurs “découvertes”.
Pour finir en beauté, le diagramme ci-dessous est l’un des résultats surprenants d’une étude statistique sur les Signes du zodiaque en correspondance avec des sujets variés commandée par le play-boy milliardaire Gunter Sachs, qui s’était entiché d’astrologie. Elle a été réalisée par Rita Küntzler, statisticienne diplômée de l’université de Münich. Dans la postface à l’ouvrage ci-dessous mentionné, elle signale avec humour que le coût de cette étude s’est situé “juste en-dessous du prix d’usine d’une Porsche 911, au tarif en vigueur en 1977”, qui en 2019 se vend à l’occasion environ 85 000 €. Tous les statisticiens ne sont pas d’accord avec certaines des sources, méthodes et conclusions de cette étude (par ex. Dean & Ertel), et l’un des plus critiques est… un astrologue statisticien !
Dijon, le 14 juin 2019.
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Les significations planétaires
par
620 pages. Illustrations en couleur.
La décision de ne traiter dans ce livre que des significations planétaires ne repose pas sur une sous-estimation du rôle des Signes du zodiaque et des Maisons. Le traditionnel trio Planètes-Zodiaque-Maisons est en effet l’expression d’une structure qui classe ces trois plans selon leur ordre de préséance et dans ce triptyque hiérarchisé, les Planètes occupent le premier rang.
La première partie de ce livre rassemble donc, sous une forme abondamment illustrée de schémas pédagogiques et tableaux explicatifs, une édition originale revue, augmentée et actualisée des textes consacrés aux significations planétaires telles qu’elles ont été définies par l’astrologie conditionaliste et une présentation détaillée des méthodes de hiérarchisation planétaire et d’interprétation accompagnées de nombreux exemples concrets illustrés par des Thèmes de célébrités.
La deuxième partie est consacrée, d’une part à une présentation critique des fondements traditionnels des significations planétaires, d’autre part à une présentation des rapports entre signaux et symboles, astrologie et psychologie. Enfin, la troisième partie présente brièvement les racines astrométriques des significations planétaires… et propose une voie de sortie de l’astrologie pour accéder à une plus vaste dimension noologique et spirituelle qui la prolonge et la contient.
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Pluton planète naine : une erreur géante
par
117 pages. Illustrations en couleur.
Pluton ne fait plus partie des planètes majeures de notre système solaire : telle est la décision prise par une infime minorité d’astronomes lors de l’Assemblée Générale de l’Union Astronomique Internationale qui s’est tenue à Prague en août 2006. Elle est reléguée au rang de “planète naine”, au même titre que les nombreux astres découverts au-delà de son orbite.
Ce livre récapitule et analyse en détail le pourquoi et le comment de cette incroyable et irrationnelle décision contestée par de très nombreux astronomes de premier plan. Quelles sont les effets de cette “nanification” de Pluton sur son statut astrologique ? Faut-il remettre en question son influence et ses significations astro-psychologiques qui semblaient avérées depuis sa découverte en 1930 ? Les “plutoniens” ont-ils cessé d’exister depuis cette décision charlatanesque ? Ce livre pose également le problème des astres transplutoniens nouvellement découverts. Quel statut astrologique et quelles influences et significations précises leur accorder ?
Enfin, cet ouvrage propose une vision unitaire du système solaire qui démontre, chiffes et arguments rationnels à l’appui, que Pluton en est toujours un élément essentiel, ce qui est loin d’être le cas pour les autres astres au-delà de son orbite. Après avoir lu ce livre, vous saurez quoi répondre à ceux qui pensent avoir trouvé, avec l’exclusion de Pluton du cortège planétaire traditionnel, un nouvel argument contre l’astrologie !
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